La Cité antique by Fustel de Coulanges & Coulanges de Fustel

La Cité antique by Fustel de Coulanges & Coulanges de Fustel

Auteur:Fustel de Coulanges & Coulanges de Fustel
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Flammarion


3. Même révolution à Athènes.

On a vu plus haut quel avait été l’état primitif de la population de l’Attique. Un certain nombre de familles, indépendantes et sans lien entre elles, se partageaient le pays ; chacune d’elles formait une petite société que gouvernait un chef héréditaire. Puis ces familles se groupèrent et de leur association naquit la cité athénienne. On attribuait à Thésée d’avoir achevé la grande œuvre de l’unité de l’Attique. Mais les traditions ajoutaient et nous croyons sans peine que Thésée avait dû briser beaucoup de résistances. La classe d’hommes qui lui fit opposition ne fut pas celle des clients, des pauvres, qui étaient répartis dans les bourgades et les γένη. Ces hommes se réjouirent plutôt d’un changement qui donnait un chef à leurs chefs et assurait à eux-mêmes un recours et une protection. Ceux qui souffrirent du changement furent les chefs des familles, les chefs des bourgades et des tribus, les βασιλεῖς, les ϕυλοϐασιλεῖς, ces eupatrides qui avaient par droit héréditaire l’autorité suprême dans leur γένος ou dans leur tribu. Ils défendirent de leur mieux leur indépendance ; perdue, ils la regrettèrent.

Du moins retinrent-ils tout ce qu’ils purent de leur ancienne autorité. Chacun d’eux resta le chef tout-puissant de sa tribu ou de son γένος. Thésée ne put pas détruire une autorité que la religion avait établie et qu’elle rendait inviolable. Il y a plus. Si l’on examine les traditions qui sont relatives à cette époque, on entrevoit que ces puissants eupatrides ne consentirent à s’associer pour former une cité qu’en stipulant que le gouvernement serait réellement fédératif et que chacun d’eux y aurait part. Il y eut bien un roi suprême ; mais dès que les intérêts communs étaient en jeu, l’assemblée des chefs devait être convoquée et rien d’important ne pouvait être fait qu’avec l’assentiment de cette sorte de sénat.

Ces traditions, dans le langage des générations suivantes, s’exprimaient à peu près ainsi : Thésée a changé le gouvernement d’Athènes et de monarchique il l’a rendu républicain. Ainsi parlent Aristote, Isocrate, Démosthène, Plutarque. Sous cette forme un peu mensongère, il y a un fonds vrai. Thésée a bien, comme dit la tradition, « remis l’autorité souveraine entre les mains du peuple ». Seulement, le mot peuple, δῆμος, que la tradition a conservé, n’avait pas au temps de Thésée une application aussi étendue que celle qu’il a eue au temps de Démosthène. Ce peuple ou corps politique ne pouvait être alors que l’aristocratie, c’est-à-dire l’ensemble des chefs des γένη726.

Thésée, en instituant cette assemblée, n’était pas volontairement novateur. La formation de la grande unité athénienne changeait, malgré lui, les conditions du gouvernement. Depuis que ces eupatrides, dont l’autorité restait intacte dans les familles, étaient réunis en une même cité, ils constituaient un corps puissant qui avait ses droits et pouvait avoir ses exigences. Le roi du petit rocher de Cécrops devint roi de toute l’Attique ; mais, au lieu que dans sa petite bourgade il avait été roi absolu, il ne fut plus que le chef d’un État fédératif, c’est-à-dire le premier entre des égaux.



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