Faites attention à moi by Alyssa Sheinmel

Faites attention à moi by Alyssa Sheinmel

Auteur:Alyssa Sheinmel [Sheinmel, Alyssa]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Jeunesse, Suspense
ISBN: 9782203205383
Éditeur: Casterman Jeunesse
Publié: 2019-09-04T08:55:08+00:00


Vingt-neuf

Quelques heures plus tard, après l’extinction des feux, le sédatif est encore présent dans mes veines, mais mes muscles me donnent plus l’impression d’avoir été transformés en gelée qu’en soupe. Je les imagine trembloter tout seuls, mes organes semblables à des morceaux de fruits en suspension dans la gélatine. J’ai la langue collante, trop grosse pour ma bouche.

Mes membres ont beau être en caoutchouc, mon cerveau est encore actif. Je contrôle mon cerveau. Je suis mon cerveau. Mon cerveau est moi. Tout ce que nous pensons et ressentons, chaque habitude, chaque mouvement, chaque trait de caractère et chaque bizarrerie proviennent de notre cerveau. Inné ou acquis, ce que nous sommes, nous le sommes parce qu’il nous le dicte. Les gens parlent souvent du cœur pour exprimer leurs sentiments (le cœur brisé, le cœur lourd, le cœur gros), mais ce sont nos neurones qui commandent. Tomber amoureux, c’est une réaction chimique dans la tête, pas dans le cœur. Ce dernier n’est qu’un muscle. Même s’il bat plus fort quand on a peur, qu’on est nerveux ou excité, c’est uniquement parce que notre cerveau le lui ordonne. Si le cœur s’arrête, les chirurgiens peuvent le remplacer par un autre, arraché au cadavre d’un généreux inconnu. Quand le cœur ne bat plus, les pompiers peuvent faire un massage cardiaque ou utiliser un défibrillateur pour le remettre en marche. Mais quand quelqu’un se retrouve en état de mort cérébrale, c’est la fin.

Je connais mon cerveau. Mon cerveau n’aurait pas inventé une personne.

Jonah était réel. J’ai touché la corne qu’il avait sur le pouce droit à force de jouer de la guitare (« C’est juste une phase, m’avait-il promis. À la fac, je ne serai pas un de ces pseudo-musiciens qui se prennent pour des artistes et qui font de la gratte au lieu d’aller en cours. »). J’ai passé les mains dans ses cheveux châtains, j’ai senti ses mèches figées par le gel coiffant dont il abusait, et je l’ai convaincu d’en mettre moins. J’ai senti le poids de son corps sur le mien, la pression de ses lèvres sur les miennes, la barbe naissante de ses joues contre ma peau. Je me suis même disputée avec lui.

— Reconnais-le : Agnès compte plus que moi à tes yeux.

On était en train de revenir du gymnase et on prenait soin de ne pas parler trop fort.

— Arrête, Hannah. Évidemment qu’elle compte pour moi.

Cela m’a rendue folle. Il admettait qu’elle comptait pour lui, mais il refusait d’établir un classement.

— Et elle compte pour toi aussi, a-t-il ajouté. Sinon, tu lui aurais déjà raconté, pour nous deux. Mais tu ne lui as rien dit, parce qu’elle compte pour toi, et moi non plus, parce que pour moi aussi.

— Tu ne plaisantes pas avec la syntaxe, toi.

Le soleil brillait si fort que je devais plisser les yeux. Ma mère n’aurait pas été contente si elle avait vu que je ne portais pas de lunettes de soleil : plisser les yeux, c’est le meilleur moyen d’avoir des rides à vingt-cinq ans.



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