Amrita by Unknown

Amrita by Unknown

Auteur:Unknown
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Flammarion
Publié: 2020-02-12T07:28:59+00:00


J’ai voulu, moi aussi, explorer l’Académie, faire ce pèlerinage, tenter d’approcher ce qu’Amrita avait vécu ces jours de 1930, lorsqu’elle a entamé sa vraie vie de peintre. Je me suis rendue rue de la Grande Chaumière un jour d’été, dans cette institution où je n’avais jamais mis les pieds.

Au téléphone, une femme m’avait précisé : ne venez qu’au moment de la pause du modèle, les après-midi, vers 14 h 45, 15 h 45 ou 16 h 45.

Je pousse à mon tour la porte de l’Académie, au 14, non sans avoir aussi jeté un œil sur les noms qui apparaissent dans des vieux cartouches à l’extérieur : Peinture : Atelier Yves Brayer, Sculpture : Atelier O. Zadkine, Peinture : Atelier Pierre Jérôme, Sculpture : Atelier Robert Wlérick… Sur le mur, cette plaque : Académie de la Grande Chaumière / Peinture-Sculpture / Fondée en 1904 / Les maîtres Antoine Bourdelle, André Ménard, Lucien Simon, Xavier Prinet, Castelucho ont enseigné ici.

J’entre et m’arrête devant le vitrail qui surplombe la deuxième porte : parmi des rameaux d’olivier, les mots Peinture, dessin, sculpture. Je songe qu’Amrita, a vu ce même vitrail en entrant la première fois, ce jour de 1930 et tous les autres jours qui ont suivi. Ils ont dû représenter beaucoup pour elle, qui venait de traverser la moitié du monde pour venir apprendre ici, solennellement, à être une artiste.

J’avance dans le couloir carrelé, tapissé de casiers blancs. Tous les encadrements de portes, de fenêtres, les plinthes sont peints d’un bleu entre le bleu Klein et le bleu roi. J’aperçois sur ma gauche la porte de ce qui doit être le grand atelier de nu. Je l’entrouvre doucement. La séance n’est pas finie, je la referme sans bruit et décide de revenir plus tard. Je longe le couloir, descends quelques marches et me retrouve au fond dans une grande salle de cours, sous une haute verrière. Un ancien atelier sans doute. Les poutres du plafond cathédrale sont peintes du même bleu. Dans un coin un petit lavabo sommaire, encadré de carreaux de céramique usés, bleus aussi. Un porte-savon orné de son savon jaune en forme d’olive semble survivre du temps où Amrita venait travailler ici. Elle a dû s’y laver les mains après les séances.

Je m’aventure dans le dédale désert du lieu. Une autre salle de classe, avec un autre lavabo identique, celui-ci surmonté d’un vieux miroir piqueté. Je m’y regarde et songe qu’elle s’y est regardée aussi. Je sais que les miroirs conservent des poussières de ceux qu’ils ont réfléchis. Ici un escalier étroit dont les montants et les contremarches ont été passés au bleu. Des casiers muets, chacun avec son cadenas. Une mystérieuse porte bleue qui semble ne mener nulle part. Puis une petite cour. Un grand escalier moderne en colimaçon, des graffitis, un air de vétusté agréable et de mélancolie. Là encore, personne.

Je reviens sur mes pas. La porte de l’atelier de nu s’est ouverte et je me glisse à l’intérieur. La séance est encore en cours comme en témoigne le modèle, une jeune femme blonde, assise sur l’estrade, nue et immobile.



Télécharger



Déni de responsabilité:
Ce site ne stocke aucun fichier sur son serveur. Nous ne faisons qu'indexer et lier au contenu fourni par d'autres sites. Veuillez contacter les fournisseurs de contenu pour supprimer le contenu des droits d'auteur, le cas échéant, et nous envoyer un courrier électronique. Nous supprimerons immédiatement les liens ou contenus pertinents.