A la recherche du temps perdu VI by Proust Marcel

A la recherche du temps perdu VI by Proust Marcel

Auteur:Proust, Marcel [Proust, Marcel]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Littérature Française
Éditeur: 3000 Ebooks Torrent
Publié: 2009-08-12T11:13:47+00:00


– Oh ! lui, ce n’est pas comme Saint-Loup, c’est un énergumène, me dit mon nouvel ami ; il n’est même pas de bonne foi. Au début, il disait : « Il n’y a qu’à attendre, il y a là un homme que je connais bien, plein de finesse, de bonté, le général de Boisdeffre ; on pourra, sans hésiter, accepter son avis. » Mais quand il a su que Boisdeffre proclamait la culpabilité de Dreyfus, Boisdeffre ne valait plus rien ; le cléricalisme, les préjugés de l’état-major l’empêchaient de juger sincèrement, quoique personne ne soit, ou du moins ne fût aussi clérical, avant son Dreyfus, que notre ami. Alors il nous a dit qu’en tout cas on saurait la vérité, car l’affaire allait être entre les mains de Saussier, et que celui-là, soldat républicain (notre ami est d’une famille ultra-monarchiste), était un homme de bronze, une conscience inflexible. Mais quand Saussier a proclamé l’innocence d’Esterhazy, il a trouvé à ce verdict des explications nouvelles, défavorables non à Dreyfus, mais au général Saussier. C’était l’esprit militariste qui aveuglait Saussier (et remarquez que lui est aussi militariste que clérical, ou du moins qu’il l’était, car je ne sais plus que penser de lui). Sa famille est désolée de le voir dans ces idées-là.

– Voyez-vous, dis-je et en me tournant à demi vers Saint-Loup, pour ne pas avoir l’air de m’isoler, ainsi que vers son camarade, et pour le faire participer à la conversation, c’est que l’influence qu’on prête au milieu est surtout vraie du milieu intellectuel. On est l’homme de son idée ; il y a beaucoup moins d’idées que d’hommes, ainsi tous les hommes d’une même idée sont pareils. Comme une idée n’a rien de matériel, les hommes qui ne sont que matériellement autour de l’homme d’une idée ne la modifient en rien.

Saint-Loup ne se contenta pas de ce rapprochement. Dans un délire de joie que redoublait sans doute celle qu’il avait à me faire briller devant ses amis, avec une volubilité extrême il me répétait en me bouchonnant comme un cheval arrivé le premier au poteau : « Tu es l’homme le plus intelligent que je connaisse, tu sais. » Il se reprit et ajouta : « Avec Elstir. – Cela ne te fâche pas, n’est-ce pas ? tu comprends, scrupule. Comparaison : je te le dis comme on aurait dit à Balzac : Vous êtes le plus grand romancier du siècle, avec Stendhal. Excès de scrupule, tu comprends, au fond immense admiration. Non ? tu ne marches pas pour Stendhal ? » ajoutait-il avec une confiance naïve dans mon jugement, qui se traduisait par une charmante interrogation souriante, presque enfantine, de ses yeux verts. « Ah ! bien, je vois que tu es de mon avis, Bloch déteste Stendhal, je trouve cela idiot de sa part. La Chartreuse, c’est tout de même quelque chose d’énorme ! Je suis content que tu sois de mon avis. Qu’est-ce que tu aimes le mieux dans La Chartreuse ? réponds, me disait-il



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