Tout porte à croire by Jalbert Laurence

Auteur:Jalbert Laurence [Jalbert Laurence]
La langue: fra
Format: epub
ISBN: 9782924973165
Éditeur: Monde Différent (Un)
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00

CHAPITRE 12

Jessie, mon idole

Tout porte à croire qu’on peut donner ce que l’on n’a pas reçu. Ma fille Jessie en est la preuve vivante.

J’ai eu le grand bonheur de vivre deux grossesses. J’ai reçu le plus incroyable des cadeaux que la vie puisse offrir: deux enfants d’amour: Jessie et Nathan.

Je suis tombée enceinte à 23 ans, à l’époque où je hurlais ma vie dans les bars. Je me souviens parfaitement du jour où j’ai appris la nouvelle. Nous étions en Beauce. C’est bien ancré dans ma mémoire, car le même jour, un de mes amis musiciens a foncé avec sa voiture dans un mur de béton.

Bien sûr, ce jour est resté gravé à jamais dans mes neurones. Car combien de fois, dans une vie, la mort et la vie se côtoient-elles à quelques heures d’intervalle? Avec la joie et la peine qui m’ont inondée à tour de rôle, ma grossesse a alors pris une signification différente. Force est de constater que c’est un peu beaucoup l’histoire de ma vie: une grande joie, une peine; un grand bonheur, un épouvantable malheur. C’est fou à quel point, quand j’y pense, ma vie continue de suivre cette tangente. Peut-être que pour les têtes dures comme la mienne, c’est la seule façon de comprendre les messages ou de trouver un sens à tout ça.

À cette époque, je demeurais dans un appartement infesté de coquerelles, rue Sainte-Catherine, à Montréal. Ce n’étaient pas les conditions idéales pour une femme enceinte. L’appartement était mal aéré et mes nausées étaient intenses. Je vivais dans la pauvreté mais, à mes yeux de femme qui portait la vie en moi, j’étais la plus riche du monde. J’étais la plus belle et la plus heureuse, la plus grande, parce que j’attendais un enfant. Je ne savais pas encore que c’était une fille même si, au fond, je l’ai toujours su. Je n’ai donc jamais pensé à trouver des prénoms de garçon. Le seul prénom que j’ai retenu du début à la fin de ma grossesse a été Jessie, celui de ma fille.

Avec le travail dans les bars et le train de vie qui l’accompagne, cette première grossesse ne s’est pas déroulée comme dans un scénario de film idéal. Bonne santé et bonne alimentation avec la vie de bar? Oubliez ça, c’est carrément impossible. Mon band et moi pouvions passer des mois, en Ontario, au Nouveau-Brunswick ou au Québec, mal logés et mal nourris: souvent à se taper un seul repas par jour. Je mangeais très souvent au Dixie Lee de Paspébiac. Avouons que c’est loin de ce que les plus jeunes s’imaginent lorsqu’ils envisagent une carrière dans la chanson. N’est-ce pas?

Malgré tout, je possédais le trésor le plus merveilleux du monde parce que je portais la Vie. C’était la seule chose qui importait et qui comptait pour moi.

Quelques jours avant la date prévue de la naissance de ma fille, par césarienne, mes parents adorés sont arrivés chez moi, à ma grande surprise. Heureusement qu’ils étaient là. Parce que le papa, lui,

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