Solitudes blanches by Nicolas Vanier

Solitudes blanches by Nicolas Vanier

Auteur:Nicolas Vanier [Vanier, Nicolas]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Roman, Aventure
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00


22

Il y avait sa main qui semblait transpercée par des pointes rouillées, il y avait Prug dont il rêvait par intermittence. Il y avait Ula qui apparaissait et disparaissait à chaque fois un peu plus belle, un peu plus inaccessible. De sa chevelure tombant en cascade jusqu’en bas de son dos sourdait une brillance surnaturelle que l’on retrouvait dans ses grands yeux noirs striés de brun. Elle était habillée avec une veste et des pantalons en cuir de renne, décorés de perles jaunes, rouges et bleues. Les coutures étaient dissimulées sous des fourrures d’hermines blanches comme neige qui faisaient ressortir le teint mat de sa peau lisse et douce comme du velours.

Klaus, entre deux sommeils, se perdait entre ce qu’il avait vécu en réalité et ce qu’il rêvait. Il en venait à se demander si cette Indienne, mi-sorcière, mi-fée, avait réellement existé. Il se réveilla avec un mal de tête intolérable, la main en sang. Une odeur fétide et pourrie se dégageait d’un doigt noirâtre. L’auriculaire de la main gauche. Ula l’avait prévenu.

Il fit rougir le poêle, se déshabilla et mit de l’eau à bouillir. Il se lava entièrement, avec soin, comme si l’eau et le savon pouvaient suffire à chasser ce qui le pourrissait de l’intérieur. Pour le doigt, il n’hésita pas. Il le trempa dans l’eau bouillante jusqu’à ce qu’il devienne insensible. Pour tenir le coup, il comptait en se fixant des objectifs de plus en plus grands.

— Cette fois, je tiendrai jusqu’à vingt-cinq.

Mais mentalement, au-delà du chiffre, c’est à Ula qu’il pensait.

— Si je tiens jusqu’à vingt-cinq, je la reverrai un jour.

Et il tenait.

Ça le rendait furieux, ces simagrées de bonne femme, mais il savait que sans elle, il aurait retiré son doigt bien avant vingt-cinq.

Alors il recommença. Jusqu’à trente, puis trente-cinq.

— Merde, merde ! J’étais tranquille, moi, avant cette maudite Indienne, j’avais tous mes doigts, toute ma tête. C’est devenu un bordel tout ça !

Il enrageait. Lui qui menait sa vie avec un flegmatisme inégalable, une tranquillité et une sérénité enviable, tout était chamboulé.

— Rien que pour une bonne femme, c’est pire qu’un wolverine !

Il avait atteint cinquante. Au-delà, il ne sentait plus rien. Il prit son couteau et le posa sur les braises incandescentes à l’intérieur du poêle puis incisa les chairs autour de l’articulation. Une odeur désagréable se dégagea de la blessure. Il faillit vomir. Il chercha la jointure et la désarticula en coupant les quelques tendons d’un seul coup, rageur. La plaie se mit à saigner abondamment. Il fit chauffer sa lame jusqu’à ce qu’elle devînt rouge, presque transparente et cautérisa du mieux qu’il put.

Il reposa le couteau et jeta dehors la phalange pourrie. Terrassé par le mal de tête, la fatigue et la douleur, il vomit le plat d’élan bouilli qu’il avait mangé la veille au soir et s’écroula sur sa peau de renne en gémissant.

*

Le poêle mourut rapidement et le froid s’engouffra dans la tente. Klaus sursauta.

— Bordel de merde !

Il n’avait plus de bois. Il était presque gelé, à peine habillé avec juste un sous-vêtement de laine.



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