Les derniers jours de Smokey Nelson by Catherine Mavrikakis

Auteur:Catherine Mavrikakis [Mavrikakis, Catherine]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Roman
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00

RAY RYAN

Alors que tu es en train de fermer ton magasin, Ray, mon fils bien-aimé, tu sens confusément que tu n’accompliras plus jamais ces gestes dans la douleur. Tout à l’heure, juste après le repas que toute ta famille réunie sous ton toit prendra dans la joie et la prière, tu partiras avec ton propre enfant, Tom, pour assister demain matin, avant l’aube, au châtiment de l’ignoble pécheur. Depuis des années ton cœur s’emplit de peine chaque fois qu’à la fin d’une journée de labeur tu clos la porte de ta quincaillerie et mets l’alarme sous tension. La voix de ta mère, Gertrude Weaver, te revient alors à l’esprit et tu entends les mots qu’elle te murmurait enfant lorsque tu avais un chagrin ou une maladie : « Laissons Dieu faire son métier de Dieu, afin que nous soyons capables de faire notre métier d’homme. Que sa volonté à lui soit faite, afin que nous puissions devenir ce que nous sommes. » Il y avait dans le ton si bienveillant de ta mère l’immense sagesse que la foi octroie aux bienheureux. Ces paroles ont toujours eu un effet apaisant sur ton âme tourmentée. Ce sont ces mêmes mots que Granny G. t’a dits lorsque tu es allé chez elle, mortifié, lui annoncer la mort de votre Sam chérie. Elle était déjà très vieille, ta mère, Ray, et tu sais combien elle avait aimé sa petite-fille, mais elle n’avait pas oublié la parole de Dieu. Et malgré sa souffrance indicible, malgré son supplice dont seul le Seigneur connaît la profondeur, ta mère t’a enjoint à ne pas désespérer. Le soir de l’annonce du meurtre de Sam et des enfants, ta mère t’a forcé à ne pas tourner dans sa cuisine comme un lion en cage. Elle t’a ordonné de t’agenouiller à ses côtés et ensemble vous avez prié à voix haute, jusqu’à ce que tu sois calmé. Quand G.G. est morte, il y a à peine quelques années, ta sœur Blanche qui s’occupait d’elle alors t’a répété qu’au moment d’être accueillie par moi dans mon royaume, G.G. a prononcé ces mots consolateurs pour tout être qui sait que je suis tout-puissant et que mes desseins les plus étranges combleront ceux qui croiront en moi : « Laissons Dieu faire son métier de Dieu, afin que nous soyons capables de faire notre métier d’homme. Que sa volonté à lui soit faite, afin que nous puissions devenir ce que nous sommes. » Je lui suis alors apparu dans toute ma splendeur. C’est ce que ta sœur Blanche t’a confié. À la fin de son existence, dans les dernières années, Gertrude Weaver s’asseyait dans son rocking-chair sur la véranda de la maison et discutait de ce bas monde directement avec Dieu. Et je l’écoutais avec intérêt tant le savoir de cette femme était grand ! C’est ainsi que ta sœur Blanche t’a expliqué les choses et c’est ainsi que ta mère a vécu.

Alors que tu fermes la porte de ton entreprise prospère (Que Dieu en soit loué !), le passé de ta famille remonte en toi.

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