Le Hun Blond by François Cavanna

Le Hun Blond by François Cavanna

Auteur:François Cavanna [François Cavanna]
La langue: eng
Format: epub
Tags: Humour
Éditeur: Le Livre de Poche
Publié: 2011-07-01T22:38:55+00:00


- Waldrude!

- Il avait sept ans.

- Il n'était pas tout à fait au point, dit Chlodmir.

- Mais il promettait !

- Il tient ses promesses, je puis te l'assurer. Sur ce point précis, en tout cas. Gunther voit le propos s'égarer :

- C'est entendu. Childéric est un chaud lapin. Il aime les femmes, il ne pense qu'à ça. Après?

- Eh bien, je lui apporte ce cadeau. Une femme comme il n'en a encore jamais eu, ni même jamais vu ! Je suis sûr qu'il ne sait pas que ça existe. Je ne le savais pas moi-même. Je l'ai achetée à un Saxon qui revenait de naviguer chez les Vandales ', de l'autre côté de la grande mer du Milieu.

L'empire de ces gens-là touche à des pays où le soleil est tellement chaud qu'il cuit les gens. Ça fait qu'ils sont tout noirs.

" La fillette que vous voyez ici n'a pas connu plus de dix printemps, pour autant qu'il y ait un printemps dans ces pays de sauvages. Pourtant, voyez, déjà les tétons lui poussent. A cause du soleil, toujours. Les filles de là-bas sont femmes très tôt. Mais, à quinze ans, ce sont des vieilles.

Chlodmir souligne, avec un gros rire :

- Il faut se dépêcher d'en profiter ! Waldrude s'informe :

- Est-elle pucelle ?

- On me l'a vendue pour telle. J'y ai mis le doigt : elle l'est.

- Sait-elle ce qu'on veut faire d'elle ?

- Elle est esclave et n'a point à le savoir.

- Comprend-elle notre langue ?

- Pas un mot. Mais notre Childéric lui parlera un langage que toutes les femmes comprennent.

1. Les Vandales, peuple germanique, après avoir conquis puis abandonné l'Espagne, s'étaient taillé

un vaste et puissant empire en Afrique du Nord.

- A-t-elle au moins un nom?

- Même pas. Tout ce qu'elle a appris, c'est qu'elle doit venir quand on lui dit " Viens là ! ". Alors je l'appelle Viens là. Elle doit penser que c'est son nom.

Gunther hoche la tête et dit :

- Qu'elle est noire !

Waldrude joint les mains et dit :

- Qu'elle est jeune !

Loup ouvre des yeux ravis et dit :

- Qu'elle est belle !

Il s'approche, Loup, il avance une main timide. La fille noire recule aussi loin qu'elle peut, se recroqueville au fond du chariot, hérissée comme un chat traqué, les yeux attentifs aux gestes du garçon. Loup dit, lentement, doucement :

- Viens là.

Et puis il sourit, comme il sait sourire : le soleil après l'ondée.

Elle ne bouge pas. Ses yeux s'attachent à ces lèvres souriantes. Le sourire est un langage que tous comprennent, d'un bout du monde à l'autre. Elle sait d'instinct ce que signifie ce langage, et comment y répondre : par un sourire. " Viens là ", c'est elle. Pour la première fois, elle entend prononcer son nom accompagné d'un sourire. Elle n'ose y croire, et puis, le sourire appelant le sourire, ses lèvres à leur tour s'entrouvrent, bien timidement d'abord, puis à pleines fossettes. Ses dents éclatantes illuminent la pénombre.

Chlodmir rabat la bâche.

Trois jours plus tard, ils arpentent les ruelles fangeuses de Tournai.



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