Le chien by Akiz

Le chien by Akiz

Auteur:Akiz [Akiz]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Flammarion
Publié: 2021-05-03T09:10:57+00:00


Valentino a accueilli les invités nocturnes. Des grands chefs, des collègues renommés, des investisseurs brillants et quelques critiques devenus amis sont entrés dans la cuisine. On se sentait honorés de faire partie de ce cercle très fermé, et en même temps les invités semblaient avoir conscience de leur faute collective, on évitait les contacts visuels inutiles.

Ils étaient presque prêts. On pouvait déjà s’asseoir. On attendait encore Pierre et ceux qui l’accompagnaient. Ils étaient en route et n’allaient pas tarder à arriver. Vous n’avez qu’à entrer, a dit Valentino, et il a conduit le petit groupe dans la salle du restaurant. Ils se sont assis l’un après l’autre. Les serveuses ont apporté le premier plat, du pâté en croûte de sanglier fourré à l’aspic, et ont servi du vin.

Entre-temps, les ortolans reposaient sur la table, nus et plumés, quelques-uns bougeaient encore. Lily a ouvert une bouteille d’armagnac monstrueusement chère et l’a vidée dans un saladier en verre. Valentino a pris le premier oiseau, délicatement pour qu’il respire encore longtemps, et a plongé le petit corps empâté dans l’armagnac, pris de panique, il agitait et battait ses ailes déplumées.

Valentino le retirait, encore et encore, afin que l’oiseau puisse récupérer, quelques secondes après il le replongeait dans le saladier jusqu’à ce que l’oiseau ne réagisse plus.

Romanov, Said et les deux commis regardaient sans dire un mot, les yeux vitreux. Le Chien et moi, on glaçait les assiettes avec une croûte de sucre qu’on saupoudrait ensuite de poudre de piment.

Il régnait un silence sinistre en cuisine, on s’échangeait uniquement les ordres et instructions strictement nécessaires, une épaisse couche de coton vaporeuse se répandait sur tout, même le pépiement des oiseaux était à peine perceptible, on entendait juste tout bas leurs cris, comme des charnières qui grinçaient.

Valentino a posé le premier ortolan dégoulinant d’armagnac, avec bec et abats, dans une poêle si brûlante qu’elle crachait de violentes étincelles lumineuses, rouge vif. L’alcool s’échappait et s’enflammait en sifflant avec agressivité et en hurlant comme une flûte bizarre, Valentino a ajouté un deuxième oiseau, et encore un troisième.

Le personnel de service a éteint toutes les lumières en salle.

On a apporté des serviettes à la société secrète.

On était derrière le passe et on reluquait dans la salle, Said à côté de moi, c’était la Ligue 1 de la haute gastronomie, il a dit, est-ce que je connaissais ce type, là, le maigre, c’était Rainer von Haven, deux étoiles, et les deux vieux là-bas, c’était des Franchouilles, Yves Chaland et Giraud, de la deuxième génération après Bocuse, ils étaient vénérés comme des pop stars en France, mais le fait que Nido ne vienne pas n’était pas une surprise.

Je n’avais jamais vu Nido de mes propres yeux, et je ne connaissais personne non plus qui l’ait rencontré personnellement.

Anatol Nido était un homme grave, avec des lunettes sombres un peu passées de mode, il n’existait que trois photos de lui sur Internet. L’une d’elles le représentait à côté de Bocuse vers la fin des années 1980, dans un bar à vins en Provence, une deuxième à un vernissage à New York.



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