Dodo by Sylvie Granotier

Dodo by Sylvie Granotier

Auteur:Sylvie Granotier [Granotier, Sylvie]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Littérature française, Policier
Éditeur: Gallimard - Série Noire
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00


12

Le 15 de l’avenue Victor-Hugo n’avait qu’une porte. Ce n’était pas un immeuble, mais une maison particulière. Hugo avait fait du chemin.

Je m’assis sur un banc proche et attendis.

Qu’est-ce que t’as fait du corps ?

Ça a été la première question des flics une fois que j’ai eu avoué.

Dès qu’ils ont posé la question, j’ai compris ma boulette. Alors j’ai fait l’andouille en espérant qu’il n’était pas trop tard.

— Quel corps ? j’ai demandé alors que je venais de tout avouer.

Un des flics s’est levé. Il avait l’air très fatigué tout d’un coup et le gentil l’a rattrapé par la manche et m’a dit : « C’est pas un problème, on va recommencer depuis le début. »

Mon amour pour Hugo me soutenait mieux que mes jambes.

Ils sont repartis à zéro. J’avais eu un dispute violente avec Paul Kanter et à bout de nerfs, j’avais saisi un pistolet qui se trouvait dans ma table de nuit. Je les ai interrompus d’un ton patient : Quel pistolet ?

Une bordée d’injures m’a répondu. J’ai fondu en larmes sans difficulté parce que j’étais très fatiguée et, en hoquetant pour que ça dure le plus longtemps possible, j’ai tenté de corriger ce terrible malentendu. J’avais effectivement souhaité de toutes mes forces posséder une arme car alors là, oui, j’aurais tiré sur ce type abominable qui m’avait réduite à l’état de loque. Mais n’ayant jamais possédé d’arme et étant d’un tempérament plutôt paisible, j’avais eu recours à la fuite et étais allée me réfugier chez une parente où j’étais sûre que Paul Kanter ne me retrouverait pas. J’étais rentrée à Paris, en espérant que, cette fois, il aurait compris et aurait disparu de ma vie, et j’avais voulu tellement fort le tuer qu’en voyant les représentants de l’ordre m’arrêter, j’avais halluciné pendant un moment, persuadée que je l’avais réellement tué, mais je dirais que c’était de l’ordre du fantasme, n’importe quel psychologue pourrait l’expliquer.

« Où se trouve Paul Kanter, alors ? » demanda entre ses dents celui que j’énervais le plus.

Je pris l’air indigné de la citoyenne qui se fait taxer autrement plus gravement que le misérable fonctionnaire sous-payé qui lui fait le coup de l’autorité et répliquai que ce n’était quand même pas à moi de faire leur boulot. Puis je baissai la tête d’un air de profonde réflexion et ajoutai au bout d’un long moment, le temps de faire renaître l’espoir sous l’uniforme : « En Allemagne peut-être. Il envisageait de s’y installer. »

— Mais vous avez dit qu’il voulait plus vous lâcher.

Je soupirai avec douceur et, en articulant bien, répétai comme à des enfants peu attentifs : Il voulait me lâcher à condition que je lui donne de l’argent, toujours plus d’argent. Mais je lui avais déjà versé un bon paquet. Il avait de quoi voir venir.

— Je n’ai jamais entendu parler d’une femme qui paye pour se débarrasser d’un type, grommela mauvais caractère.

— Parce que vous n’avez jamais été une femme battue, dis-je avec dignité.

— Mais vous savez, reprit le doucereux, c’est une circonstance atténuante, ça. Il vous battait, donc ?

— Oh, je suis bien d’accord, vous savez.



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