Prudence Hautechaume by Marcel Jouhandeau

Prudence Hautechaume by Marcel Jouhandeau

Auteur:Marcel Jouhandeau [Jouhandeau, Marcel]
La langue: fra
Format: epub
Tags: littérature française
Éditeur: La Gang™
Publié: 1927-01-14T23:00:00+00:00


Madeleine et Marie avaient un frère et une sœur qui vivaient au loin. Tous leurs autres parents sans doute étaient morts.

Benjamin, leur frère, un jour parut devant la porte avec sa femme, la grande Françoise. Elles fondirent en larmes en reconnaissant dans ce petit vieux le petit garçon qui avait partagé leurs jeux de gamines et Madeleine supplia Prosper de ne pas les laisser repartir. Prosper acheta une maison grands comme une coquille de noix qui était voisine de la leur ; il y installa Benjamin et la grande Françoise pour faire plaisir à Madeleine.

Un peu plus tard, Marie l’aînée reçut de Rose, leur sœur qui était plus jeune qu’elles deux, une lettre longue. Rose venait de perdre son mari et restait seule, obligée de « se placer » pour nourrir sa fille Ermeline qui avait sept ans.

Grégoire, le suisse, sans attendre la prière de Marie demanda au sacristain qui savait écrire d’adresser une lettre à Rose pour l’inviter à les venir voir.

Dès qu’Ermeline eut paru sur la colline, tout se transforma autour d’elle. Les deux vieilles cessèrent de parler de leur enfance, comme si elles eussent enfin réellement retrouvé le petit être merveilleux qui hantait leurs conversations et les deux soldats de Napoléon abandonnèrent leur contenance d’amoureux. Dès le premier jour, chacun d’eux avait pris à son compte la moitié du cœur du défunt père d’Ermeline.

Sur la colline personne ne demeura plus inoccupé. Madeleine et Marie, le prochain jour de marché, firent provision de fil, de laines, d’étoffes, d’aiguilles. Elles travaillaient pour la petite, tandis que sa mère passait ses journées chez les Brinchanteau, en qualité de nourrice sèche, auprès de Théophile.

Le suisse avait installé un petit lit-cage en fer forgé au pied de son lit de bois « bateau », où il dormait avec Marie.

Benjamin était tout disposé à se réjouir avec ses sœurs de la venue d’Ermeline, mais la grande Françoise sa femme qui avait compté sur la succession de ses beaux-frères devint jalouse de la petite qui serait son héritière aussi.

Ermeline qui avait ouvert les yeux dans une mansarde de grande ville était arrivée sur la colline de Beausoleil un matin de mai. Les églantines roses, l’aubépine blanche qui encadraient l’allée des deux ermitages ; le marronnier de la cour, orné des panaches d’or qu’on apercevait du plus loin l’avait accueillie comme une fête. Elle en restait éblouie.

Prosper, le plus ingénieux des oncles, lui avait bâti le jour même de son arrivée, au moyen de planches cirées, un petit fauteuil semblable à la fois à un trône et à une niche, que Marie et Madeleine avaient capitonné de velours et quand Ermeline y fut assise, Grégoire, pour l’amuser, passa ses journées à lui sculpter dans les marrons de la cour avec un couteau ramassé sur le champ de bataille de Sébastopol des légions de poupées. Plus tard, il alla cueillir dans la vallée du maïs pour leur faire des chevelures.

Ermeline grandit au milieu de cette cour d’adorateurs. Les quatre visages ne cessaient d’épier son sourire, la joie plus profonde de son regard, celle si obscure de son cœur.



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