Les brutes et la punaise by Dominique Payette

Les brutes et la punaise by Dominique Payette

Auteur:Dominique Payette [Payette, Dominique]
La langue: fra
Format: epub
Tags: littérature québécoise, essai
Éditeur: Lux Éditeur
Publié: 2019-04-06T22:00:00+00:00


CHAPITRE 4

FIN DE LA DISCUSSION

Au début des années 2000, Jeff Fillion et ses collaborateurs ont tourné en dérision un couple âgé de Cap-Rouge, monsieur et madame Descarreaux, qui avaient disposé de très nombreuses décorations de Noël sur leur terrain ainsi qu’à l’intérieur de leur maison[105]. Le concours lancé par ces hommes de radio s’appelait «Les crottés du quartier». Ils ont d’abord laissé entendre qu’ils admiraient leur travail, qu’ils désiraient partager leur passion de Noël avec leur auditoire, ce qui a comblé de joie le vieux couple. C’était un piège, car l’animateur n’avait qu’une idée en tête: s’amuser à leurs dépens. Lorsque monsieur et madame Descarreaux se sont aperçus qu’ils étaient devenus la risée de leur entourage, ainsi que de la région de Québec, ils ont été totalement dévastés. Madame Descarreaux a dû être hospitalisée dans les jours qui ont suivi. Le couple n’a pas engagé de poursuite contre la station de radio, car revenir sur cette humiliation devant un tribunal lui était insupportable. Personne ne mérite un tel traitement. Jamais.

On a vu dans les chapitres précédents que les radios d’opinion ont changé leurs manières depuis cette époque. Désormais, elles ciblent des groupes plutôt que des passionnés de l’esprit de Noël ou des lectrices de bulletins météo. Leur virulence, surtout, a une teneur de plus en plus politique. Il serait toutefois faux de croire que ces animateurs se contentent pour autant de vitupérer contre les féministes en général, les cyclistes comme groupe, l’ensemble des Autochtones ou tous les syndicalistes, sans jamais concentrer leur rage sur des individus en particulier. Ces groupes possèdent des représentants, des membres et des alliés, que les radios-poubelles ne manquent pas de vilipender. Leurs leaders ou leurs porte-parole font souvent l’objet d’attaques féroces. Or, lorsqu’on est actif dans la sphère publique, il est très difficile de se protéger contre ces assauts. L’engagement social et politique est souvent considéré comme un sport de combat: lorsqu’on prend position dans la Cité, ne faut-il pas s’attendre à recevoir des coups? Il ne faut pas oublier, toutefois, que même la boxe a ses règles et son code d’honneur. Mais sur les ondes des radios d’opinion, les règles fondamentales du journalisme sont-elles respectées? Et la violence verbale dont font preuve ces animateurs n’entre-t-elle pas en totale contradiction avec la liberté d’expression dont ils affirment se prévaloir? Un comportement médiatique qui rend la poursuite de la discussion démocratique impossible est-il légitime? Ce sont là des questions que se sont déjà posées tous ceux et celles qui ont subi les foudres de ces radios.

Une syndicaliste bien en vue de la région de Québec, qui préfère comme plusieurs victimes garder l’anonymat, le sait d’expérience. Lors d’une importante négociation du secteur public, elle a été malmenée pendant des semaines par Jean-François Fillion. Elle a encaissé les coups. Mais ceux-ci pleuvaient et ils ont fini par affecter ses proches. La peur s’est alors insinuée jusque dans sa vie familiale. Un jour, son fils de 10 ans a eu maille à partir avec ses camarades dans la cour de son école.



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