La TVA, invention française, révolution mondiale by Denys Brunel
Auteur:Denys Brunel
La langue: fra
Format: epub
ISBN: 978-2-212-55299-7
Éditeur: Éditions d’Organisation, Groupe Eyrolles, 61, bd Saint-Germain, 75240 Paris Cedex 05.
Publié: 2012-01-17T16:00:00+00:00
L’erreur à 100 milliards d’euros par an, ou pourquoi Maurice Lauré avait raison
Bruxelles a donc péché par utopisme. Utopisme économique d’abord, en pensant un jour être en mesure d’imposer à l’ensemble de ses membres, sinon un taux unique de TVA, du moins un tunnel étroit. Utopisme politique ensuite, en songeant que la création de l’espace Schengen parviendrait à elle seule à faire aimer l’Europe. La suppression des douaniers, pour les hommes et les marchandises, semblait un impératif majeur dont les conséquences ne furent, hélas, pas évaluées : de nos jours, le moindre dispositif de lutte contre la fraude bute contre cet impératif, que Lauré avait rebaptisé la « bible ». Même sa proposition d’instaurer un corps de douaniers européens, qui ne supposait qu’un seul contrôle par frontière, fut rejetée sans ménagement au nom de l’irrésistible slogan de « l’Europe sans frontières ». Au lieu de celui-ci, il faudrait parler d’une « Europe sans contrôles aux frontières »19 puisque les frontières fiscales, elles, n’ont pas disparu. Quant aux contrôles inopinés, qui seraient réalisés par les douanes à l’intérieur des territoires, qui n’ont jamais trouvé la moindre efficacité mais sont toujours motivés par le fait de ne voir en aucun cas l’uniforme d’un douanier à un poste-frontière, Lauré les avait immédiatement tournés en dérision, jugeant que « si l’on veut contrôler les accès à un immeuble, le plus facile est quand même un contrôle à l’entrée de l’immeuble plutôt que d’envoyer des vigiles dans les étages contrôler les personnes ».
Le système mis en place génère d’énormes difficultés pour recueillir les informations nécessaires, à la fois, à l’appareil statistique et à la lutte contre la fraude. Les douaniers de chaque pays doivent patrouiller, parfois avec difficulté, d’une entreprise à l’autre pour exercer leurs contrôles.
Si l’on prend le cas d’un exportateur français qui vend ses produits en Grande-Bretagne, la première difficulté dérive du rapprochement des dates correspondant aux différentes étapes de la chaîne : puisqu’il n’y a pas de tampon à la frontière, le contrôle devra s’effectuer sur le rapprochement de trois dates (date de départ de l’expédition, date de la facture, date de la réception). Outre le fait que ces dates ne sont pas toujours évidentes à certifier, le processus est fastidieux. Par ailleurs, il faut ajouter à cette première difficulté celle de la conversion des devises : la facture est-elle en euros ou en livres ? Pour que ce contrôle fonctionne, il faudrait, pour conclure à l’absence de fraude, une coordination parfaite entre le contrôleur français et son homologue anglais ! S’ajoutent encore les difficultés d’identification : un numéro d’immatriculation est attribué à chaque entreprise, mais encore faut-il pouvoir contrôler à quoi correspond le nom du destinataire et son numéro. Une fraude relativement classique réside dans la fabrication de faux noms et numéros.
Maurice Lauré indique que le régime de la TVA du pays d’origine ne serait pas davantage une solution en l’absence de contrôle aux frontières :
« Hélas, c’est encore méconnaître le rôle capital des frontières pour la bonne administration d’un système
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