La prisonnière du désert by Alan Le May

La prisonnière du désert by Alan Le May

Auteur:Alan Le May [Le May, Alan]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Western, Littérature américaine, Amérindiens, États-Unis
Éditeur: Éditions du Rocher
Publié: 1995-12-31T23:00:00+00:00


Chapitre XIX

Mart Pauley reprit brusquement conscience sans avoir aucune idée de ce qui l’avait réveillé. À ses côtés, Amos respirait régulièrement. Chacun dormait enroulé dans ses couvertures, mais ils partageaient la toile de tente dans laquelle ils s’enveloppaient entièrement, y compris la tête, pour s’abriter des intempéries. L’air froid sécha la légère humidité des narines de Mart quand il mit la tête au dehors. Il ne faisait qu’un vent très léger qui murmurait à la surface de la neige. Les braises de leur feu palpitaient doucement dans le courant d’air. D’après leurs scintillements, il jugea qu’il était un peu après minuit. Tout d’abord, il n’entendit rien. Mais, comme il retenait son souffle, une saute de vent lui ramena le bruit qu’il avait dû entendre dans son sommeil, si léger, si lointain, que ç’aurait pu être le bourdonnement du froid dans ses propres oreilles.

Il resserra lentement son étreinte sur le bras d’Amos jusqu’à ce que celui-ci s’éveillât.

— Qu’…, qu’… qu’est-ce qui se passe ?

— Je suis sûr d’avoir entendu le bruit d’une bataille, dit Mart, très loin d’ici.

— Que le meilleur gagne, dit Amos en se réinstallant pour se rendormir.

— Je veux dire une vraie bataille… une bataille contre les Indiens… Tiens !… Est-ce que ça n’est pas un bruit de trompette, loin en aval de la rivière ?

Quelques petits flocons de neige leur effleuraient le visage. La nuit redevint absolument silencieuse dès qu’Amos se mit sur son séant :

— J’entends rien.

Mart n’entendait plus rien non plus.

— Il neige encore.

— Ça fait rien. On rattrapera Bonnet Bleu. La neige pourra pas nous le cacher, maintenant. Ça le retiendra seulement jusqu’à ce qu’on arrive !

Mart demeura éveillé un moment, écoutant de toutes ses oreilles. Aucun autre son ne parvint à traverser la chute de neige qui allait augmentant.

Longtemps avant l’aube, il fît cuire à la poêle leur petit déjeuner de viande de buffle séchée, coupée en languettes. Puis il donna à manger aux chevaux.

— Aujourd’hui, dit Amos, lorsque, les jointures ankylosées, ils enfourchèrent leurs selles glacées.

C’était la première fois qu’ils disaient cela, après les innombrables occasions où ils avaient dit : « Demain. » Cependant, c’était lancé d’une voix rude, sans joie. La journée s’annonçait froide. La neige continuait de tomber, tandis qu’ils allaient de l’avant, dans l’obscurité qui précédait une aube terne.

Au milieu de la matinée, ils atteignirent la Canadian, et passèrent à gué ses hauts-fonds qui n’avaient pas gelé. Ils bifurquèrent vers l’aval et à midi tombèrent sur le village de Bonnet Bleu… ou du moins sur l’emplacement où il avait connu ses dernières heures sur terre.

Ils rencontrèrent d’abord les chevaux morts. Dans un large méandre de la rivière, éparpillés sur plus d’un mile de terrain plat, gisaient près d’une centaine de chevaux à buffles, dont le froid avait retroussé les lèvres sur leurs longues dents. La neige avait cessé, mais pas avant de s’être tamisée sur les chevaux, le sang, les empreintes fraîches qui avaient dû être faites aux premières heures de l’aube. Il n’était pourtant pas nécessaire d’étudier les empreintes.



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