Ma mère, Dieu et Litzie by Roland PEREZ

Ma mère, Dieu et Litzie by Roland PEREZ

Auteur:Roland PEREZ [Perez, Roland]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Les escales éditions
Publié: 2023-09-28T14:39:03+00:00


Chapitre 19

Les montagnes russes

— Le petit dort ? Asseyez-vous, il faut qu’on vous parle.

Toute l’équipe avait débarqué chez nous un samedi après-midi et, par la voix de la cheffe, Martine L., nous avait ordonné de prêter attention. Visiblement, ils avaient quelque chose d’absolument crucial à nous dire. Leur mine était si grave, si sévère, que nous explosâmes de rire, Litzie et moi. Nous croyions à un canular ! Mais bien vite leur sérieux nous gagna, surtout quand je remarquai qu’aucun d’entre eux ne manquait à l’appel.

Sur les deux canapés, serrés comme des sardines, il y avait Philippe et Nathalie, que j’avais présentés l’un à l’autre, en ma qualité de Cupidon et avec succès puisqu’ils s’étaient mariés peu de temps auparavant ; Patrick, mon pote de la première heure (puisque j’avais enfoui tout au fond de ma mémoire le souvenir de Gérald) ; les deux Martine ; Raquel, ma petite-cousine qui était de toutes les aventures malgré la décennie qui nous séparait ; et enfin Jean-Claude et Monique, tous les deux avocats comme nous et avec qui nous étions toujours fourrés. C’est d’ailleurs Monique, championne en titre de l’éloquence, qui prit la parole pour inaugurer une scène absurde et inoubliable.

Droite comme un i alors qu’elle n’avait qu’une fesse sur le bord d’un canapé, ses jambes interminables croisées et ses pieds chaussés d’escarpins Chanel couleur crème, vêtue d’un tee-shirt noir et d’un pantalon de la même couleur en crêpe, ses deux sautoirs de grosses perles blanches se soulevant au rythme de sa poitrine hypnotisante, elle se mit à parler.

Le moment se voulait solennel. Litzie et moi étions finalement restés debout, commençant à prendre la pleine mesure de la gravité de la situation. Monique commença son allocution d’un ton professoral.

— Vous savez qu’Harold est un petit garçon.

Litzie et moi échangeâmes un regard consterné.

— Oui… Et donc ? Où est-ce que vous voulez en venir ? On ne comprend rien ! m’énervai-je, sentant l’exaspération monter.

— Et donc, depuis sa naissance et probablement depuis l’erreur de la première échographie, vous faites un déni de garçon ! En tout cas, c’est ce qu’on en conclut, vu les vêtements dont vous affublez votre fils. Et je ne parle même pas des barrettes à paillettes et des bandeaux en satin ! L’autre jour, il portait une blouse fleurie, tout le monde au parc Monceau s’extasiait sur la jolie petite fille qu’il était ! Écoutez, personne n’ose vous le dire. Donc, nous, en amis que nous sommes, on s’est concertés, et on a décidé de faire une intervention pour vous annoncer que vous ne pouvez pas continuer ainsi.

Stupéfaits, nous nous assîmes, assommés par le poids de la diatribe de Monique qui avait à peine repris son souffle, sous le regard fuyant et gêné des uns et des autres. Muets, nous comptions probablement l’un sur l’autre pour protester, contester, nous défendre !

Harold était le premier enfant de notre bande d’amis. Il venait d’avoir trois mois et nous l’emmenions partout avec nous, dans la moindre de nos virées et de nos sorties.



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