Celle que je ne suis pas by Kristen Rivers

Auteur:Kristen Rivers [Rivers, Kristen]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Erotique
ISBN: 9782824633800
Éditeur: City Editions
Publié: 2020-02-13T11:12:40+00:00

21

Gardant une main sur le guidon le long du chemin vers le plan d’eau, j’utilise l’autre pour appeler Angie. Elle ne répond pas, ce qui ne devrait pas me surprendre. Ça fait un moment que je n’ai pas réussi à la joindre. Soudain, une nouvelle idée effleure mon esprit. Je m’arrête sur un parc à la sortie de la ville pour bidouiller mon téléphone, ce qui me permet de lui passer un coup de fil en numéro masqué.

— Allô ?

Bingo !

— Angie ? C’est Arielle.

J’ai peur qu’elle raccroche après avoir compris qu’il s’agit de moi.

— Oui ?

J’aurais aimé entendre un peu plus d’enthousiasme de sa part. Sa spontanéité a totalement disparu.

— Comment tu vas ?

Elle met un certain temps à répondre, et chaque seconde passée dans le silence est une nouvelle éternité d’angoisse pour moi.

— Bien.

— Vraiment ?

Je fais la grimace. En m’entendant, j’ai l’impression de parler comme ma mère, ce qui est assez horrible pour une adolescente. En même temps, c’est peut-être de ça que mon amie a besoin.

— Puisque je te le dis. Bon, salut.

— Attends, ne quitte pas tout de suite ! Je m’inquiète pour toi, Angie.

— Tu t’inquiètes ? Dans ce cas, pourquoi est-ce que tu t’es barrée comme une voleuse ?

— Qu’est-ce que tu voulais que je fasse d’autre ? Ma famille est partie, je les ai suivis.

— Nous aussi, nous étions comme une famille pour toi, Claire et moi. Du moins, c’est ce que je croyais. D’autres solutions s’offraient à toi, Arielle, mais tu n’as pas voulu les saisir.

Elle n’a pas entièrement tort. Le lycée privé que nous fréquentions proposait aussi une formule d’internat. J’aurais pu y faire ma terminale sans changer de ville. Mais j’ai préféré suivre mes parents et mon frère.

— Et tu sais pourquoi tu n’as pas voulu les saisir ? reprend-elle.

— Oui ! Parce que je tiens à ce qu’il reste de ma famille ! m’offusqué-je.

— Faux ! crie-t-elle. C’est parce que tu es une trouillarde. Parce que tu préfères fuir plutôt que d’affronter tes problèmes.

— Je t’interdis de me parler comme ça !

— Ah bon ? Il fut temps où nous pouvions tout nous dire, surtout la vérité. Il faut croire que cette époque est morte avec ta sœur.

Ses paroles me font l’effet d’une violente gifle. De rage, je jette mon téléphone devant moi. Il s’écrase en mille morceaux sur le sol, ce qui ne fait que m’énerver davantage. Je viens de balancer près de trois cents euros en l’air pour un caprice de gosse de riche alors que des gens comme Emna ont à peine de quoi subvenir à leurs besoins de base. La culpabilité m’étouffe. Pour ceux qui souffrent. Pour les amies que j’ai laissées derrière moi. Pour la sœur que je n’ai pas sauvée.

Les larmes que je retenais depuis un moment me brouillent la vue, si bien que je ne suis plus en mesure d’avancer. Je dépose mon vélo contre un arbre et vais m’asseoir sur le banc le plus proche. Je suis consciente de poser un lapin à Éric. En même temps, ce n’est pas comme si j’étais en état de rouler, ou comme si j’avais mon téléphone pour le prévenir que je serai en retard.

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