À la recherche du rat-trompette by Joubert Jean

À la recherche du rat-trompette by Joubert Jean

Auteur:Joubert,Jean [Joubert,Jean]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Jeunesse
Éditeur: Zozio - Bookaniers
Publié: 2014-11-10T19:46:23+00:00


14

C’est le vieux qui nous a réveillés en frappant contre la porte avec son bâton.

— Debout là-dedans, il est six heures !

J’ai fait un bond, le cœur battant, et j’ai vu que mon père s’était assis dans son duvet, les cheveux ébouriffés, l’air un peu hagard.

— Oui, oui, merci. On vient.

— Prenez votre temps, je vais faire le café.

Par une fente de la porte se glissait un mince rayon de soleil, dans lequel dansaient la poussière et quelques moucherons.

Maintenant mon père se grattait la tête avec frénésie, en faisant des tas de grimaces.

— Ça me démange. J’ai l’impression qu’il y a des bestioles dans cette fougère. Tu ne sens rien ? Tu as bien dormi ? Oui ? Tu as de la chance. Ah, quelle nuit ! J’ai mal aux reins, dans les mollets, et puis la bouche pâteuse. Ça doit être ce vin… On n’a pas idée de tirer des honnêtes gens du lit à une heure pareille !

Mon père, il a parfois des réveils difficiles : paupières lourdes, rictus, grognements, la vie est atroce, d’où venons-nous ? où allons-nous ? pourquoi bouger ? Il n’y a guère que le café qui puisse le sortir de ce brouillard, et je savais que, dans une demi-heure, il aurait retrouvé son optimisme, et que le monde se serait remis en place. Le vieux n’avait-il pas parlé de café ? Alors tout irait bien.

J’ai dit :

— Tu as vu ce joli rayon de soleil, on croirait un rayon de miel, le regard d’un ange…

Et lui, d’un air morne :

— Tu es bien poétique, ce matin ! Je voudrais être comme toi. Ah, mon royaume pour une tasse de café ! Mais, tu entends ? on dirait qu’il y a d’autres bestioles dehors.

En effet quelque chose soufflait et reniflait sous la porte, et j’entendais comme des bruits de langues.

En sortant de la cabane, nous sommes tombés sur une armée de vaches et de veaux, qui se prélassaient au soleil et léchaient le sel que le vieux répandait par poignées sur des pierres plates. Ils avaient l’air paisibles dans la belle lumière de l’aube, qui caressait l’herbe et les feuillages. Parfois seulement une vache se mettait à meugler ou un veau à galoper sur la prairie, comme s’il avait été piqué par quelque mouche. Près du foyer, d’où montait une légère fumée, Manuel cassait du bois. Les bols étaient prêts sur la table.

J’aime bien les premières heures de la matinée, quand c’est l’été et qu’il fait beau, mais j’aime encore mieux rester dans mon lit à dormir ou à rêvasser. De telle sorte que, je l’avoue, je n’ai pas eu très souvent l’occasion de voir le soleil se lever, en dehors des matins d’hiver où il faut s’arracher du lit pour aller au collège, et là c’est franchement horrible. Pendant les grandes vacances, mes parents doivent me secouer et me houspiller : « Qu’est-ce que tu fabriques ? Tu n’as pas honte, il est neuf heures et il fait un temps merveilleux ! »



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