Voyage avec les morts by Barbara Hambly

Auteur:Barbara Hambly [Hambly, Barbara]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Fantastique
Publié: 2020-04-18T16:00:00+00:00

XII

Asher s’éveilla à l’appel du muezzin : « Il n’y a de Dieu que Dieu seul et Mohammed est Son Prophète… » Il connaissait les paroles rituelles, mais ne pouvait les isoler dans le flot monotone de la prière.

La pièce où il se trouvait avait été percée autrefois sur toute sa longueur, cinq fois supérieure à sa profondeur, de fenêtres cintrées qui avaient été ensuite murées de briques, quelques siècles auparavant. Les ouvertures pratiquées dans le tambour des cinq coupoles peu profondes du plafond étaient munies, lui semblait-il, de barreaux en argent, mais il n’aurait pu l’affirmer. Le jour, aucun bruit de voix ne montait jusqu’à lui, aucun bruit de sabots d’âne, aucun grincement de roues ; rien que l’aboiement lointain et intermittent des ignobles chiens de Constantinople. Parfois, le vent lui apportait le cri d’un marchand des rues, dans un grec romaïque assez pauvre. De jour comme de nuit, les sons les plus proches restaient le cri rauque des mouettes et le miaulement des chats.

À travers le grillage, le ciel avait la couleur des lis tigrés, d’un rose saumon très doux qui pâlissait contre les carreaux bleus des coupoles.

Asher ne se tourna pas vers la Mecque – même si par déduction il en avait repéré la direction, pas plus qu’il ne répéta les paroles du muezzin, mais, assis parmi les coussins et les couvertures du divan, il pria. Il ressentait une peur intense.

Quand il eut terminé, la lumière avait foncé ; sa teinte rouge sang cédait la place à l’ombre. À cause des coupoles, l’obscurité gagnait la pièce par le bas. En son centre, le bassin rectangulaire carrelé de faïence bleue qui avait dû être une fontaine ou un vivier paraissait d’une profondeur insondable dans la pénombre, sinistre chose dont pouvait émerger n’importe quoi. Asher gratta une allumette qu’il avait dans sa poche, et alluma la mèche de l’une des lampes de bronze disposées dans la rangée de niches du mur. Sa lueur ne suffisait pas à dissiper l’obscurité inquiétante qui envahissait la pièce. Il chercha sa montre pour la remonter, comme à son habitude ; on la lui avait confisquée, naturellement, de même que les chaînes d’argent qui protégeaient ses poignets et sa gorge.

L’oreille aux aguets dans la nuit qui gagnait la maison silencieuse, il se lava et s’habilla, puis rangea dans un placard peu profond les éléments de literie dans lesquels il avait dormi. Quand la nuit fut noire – noire au point de ne pouvoir distinguer un fil blanc d’un fil noir, dit le Coran –, il entendit une clef tourner dans l’antique serrure.

Il s’éloigna de la porte autant qu’il le put, et appliqua son esprit à rester insensible, à ne pas tomber dans l’étrange absence que savait lui imposer un vampire. En dépit de ses efforts, il ne les vit pas entrer dans la pièce. Il avait la vague impression de rêver : il se tenait dans une galerie plutôt obscure, et regardait une porte incrustée d’ivoire et de cuivre qui s’entrouvrait…

Il se vit un

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