Une nuit à Pompéi by Alain Jaubert

Une nuit à Pompéi by Alain Jaubert

Auteur:Alain Jaubert
La langue: fra
Format: epub
ISBN: EPUB9782072022791-40001
Éditeur: Editions Gallimard


Cette histoire n’en est pas tout à fait une. Juste un moment, un souvenir, une sorte d’épiphanie. Si j’étais poète, j’en ferais une courte pièce suggestive. Et même un haïku, pourquoi pas ? C’était sur la côte amalfitaine, au cours de ces années où, mes amis et moi, nous l’avons fréquentée avec amour au point d’y revenir chaque été et d’y séjourner une huitaine ou une quinzaine de jours vers Pâques ou au mois de mai, et même, une fois, fin décembre, pour un réveillon mémorable. Puis le groupe s’est un peu disloqué, nous avons espacé nos rencontres, nos échanges, plusieurs se sont perdus de vue. Vous savez ce que c’est que l’amitié, les liens se distendent, des complicités qu’on croyait éternelles se dissolvent peu à peu, la vie des uns, la vie des autres, les intérêts des uns ne sont pas ceux des autres, et ainsi de suite… Bref, Amalfi et sa côte, ça n’a été qu’un temps dans notre vie. Tous s’en souviennent avec émotion, j’en suis sûr. Une belle époque, pleine de rires et d’aventures, de soleil et de baignades, et, je pourrais ajouter, de jeunesse insouciante.

Cette année-là, toute la péninsule semblait en flammes. Le vent d’ouest avait fait s’envoler quelques braises d’un feu imprudent du côté du Monte Ceruasolo, une zone de la forêt et du maquis s’était embrasée, les flammes avaient couru sur des kilomètres, coupant les routes entre Castellamare et Amalfi, cernant des villas près d’Agerola, attirant des curieux qui, depuis Positano ou Maiori, montaient en voiture vers les cols et les sommets pour observer le phénomène. Les véhicules bouchaient les routes, les pompiers qui arrivaient de partout, Nocera, Salerne et même Naples, ne pouvaient plus passer, les sirènes hurlaient de tous côtés dans les lacets de la montagne. Certains villages semblaient menacés. Les rumeurs les plus folles couraient dans les stations de la côte et sur les plages. Des hélicoptères passaient, les baigneurs leur faisaient de grands gestes joyeux sans se douter que, si le vent forcissait, même leur plage serait menacée. C’était, une fois de plus, l’habituelle crise de folie napolitaine.

Rien d’autre à faire qu’attendre et ne pas changer ses habitudes. Je suis parti nager, assez loin, comme toujours. J’ai longé la côte vers l’ouest, quittant la vue des plages et prenant la tour d’Amalfi pour cap. Quand on nage ainsi loin du rivage ou qu’on fait paresseusement la planche, il ne faut surtout pas penser aux dangers de la mer — tornades, tsunamis, requins… — ni à ses fonds. Si l’on se met à imaginer que, juste en dessous de soi, s’ouvrent cent ou deux cents mètres d’abîmes, avec des gouffres, des canyons sous-marins, des crevasses menaçantes et obscures, alors on se sent pris d’une légère panique qui peut très vite s’amplifier et dégénérer, un peu à la manière d’un incendie, justement. On est dans la position du somnambule qui fait des prodiges en dormant mais qui risque de chuter si on le réveille. Il suffit de songer à tous ces



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