Une jeune femme en guerre, Tome 4 by Maryse Rouy

Une jeune femme en guerre, Tome 4 by Maryse Rouy

Auteur:Maryse Rouy
La langue: fra
Format: epub
ISBN: 978-2-76441-054-7
Éditeur: Les Éditions Québec Amérique


En proie à une grande agitation, elle arpentait son logement d’un pas coléreux, vouant au diable Richard qui par deux fois avait pris son plaisir sans penser aux conséquences. Une première fois avec une femme infectée, probablement une prostituée, et la deuxième avec elle, qui se trouvait maintenant victime de son imprudence. Comment se tirerait-elle de là ? Il y avait des années qu’elle n’avait pas été malade et ne connaissait que le docteur Vermette. Pas question d’aller chez ce vieil ami de son père qui l’avait terrorisée pendant toute son enfance ! Alors où ? Il y avait le gentil docteur Deslauriers dont elle avait été la réceptionniste le printemps précédent, mais elle n’oserait jamais, elle aurait trop honte. Puis elle pensa que Richard péchait peut-être par excès de prudence. Puisqu’elle ne ressentait absolument rien, il était possible qu’elle ne soit pas malade. Elle allait attendre quelques jours.

Elle se prépara un thé qu’elle but debout, devant la fenêtre, en observant les passants se diriger vers le parc Lafontaine à la recherche d’un peu de fraîcheur. Même si le mois d’août touchait à sa fin, il faisait toujours aussi chaud à Montréal.

Ensuite, elle relut la lettre de Richard. Il parlait de graves séquelles. Quelles séquelles ? Et graves ? Graves comment ? Très graves ? Avant toute chose, elle devait s’informer sur cette maladie dont elle ignorait tout, ce qui lui éviterait peut-être une confrontation humiliante avec un médecin. Une jeune femme célibataire avec une maladie vénérienne ! Elle imaginait le praticien la regardant avec dégoût en la traitant de fille perdue. Son dictionnaire lui apprit que la blennorragie était une inflammation microbienne de la muqueuse des organes génitaux. Elle n’était pas plus avancée. Ce qu’elle voulait savoir concernait sa contagiosité, son traitement et les fameuses séquelles qu’elle pouvait entraîner. Il aurait fallu consulter un dictionnaire médical. Elle ignorait si sa qualité d’étudiante en droit lui donnait accès à la bibliothèque de médecine, ce qui lui fit penser à Irène. Irène, bien sûr ! Pourvu qu’elle soit rentrée de Québec où elle était partie en vacances dans sa famille ! Elle composa fiévreusement son numéro et Irène répondit.

Après un échange de civilités qu’elle écourta le plus possible, Lucie demanda à son amie ce qu’elle savait de la blennorragie.

— La blennorragie, répéta Irène interloquée.

— Oui, c’est ça, qu’est-ce que tu en sais ?

— Eh bien, des généralités. C’est au programme de cette année, nous ne l’avons pas encore vu. Il faudrait que je vérifie dans mes livres pour être précise.

— Pourrais-tu le faire rapidement, s’il te plaît ?

— Qu’est-ce qui se passe, Lucie ? C’est pour toi ? Qu’est-il arrivé ?

— Peu importe, j’ai besoin de savoir.

— Voilà ce que je vais faire : je consulte mes documents et je viens chez toi. On en parlera.

— Ce n’est pas la peine de te déranger.

— Ça ne me dérange pas. Ce soir, je sors avec Jacques. Il était prévu qu’il passe me prendre, mais je vais l’avertir que je serai chez toi.

Sans que Lucie puisse protester davantage, elle lui dit À tout de suite et raccrocha.



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