Un voyage au mont Athos by Augiéras

Un voyage au mont Athos by Augiéras

Auteur:Augiéras
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Grasset


Deuxième partie

CHAPITRE IV

Josué, la Forêt Sacrée, et le voyage à lérissos

Depuis la fin de la nuit, j'allais toujours plus haut dans la forêt. J'avais dépassé les cendres calcinées des derniers campements de bûcherons, les tas de copeaux pourrissants, les huttes de branchages installées entre les arbres centenaires. Un torrent grondait entre des rocs qu'il submergeait par endroits de ses flots puissants et réguliers. Je descendis jusqu'à lui, j'entrai dans l'eau glacée. C'était maintenant le seul passage possible dans la forêt si dense qu'elle devenait impraticable.

Le jour se levait, rose et doré, illuminant les marbres blancs de l'Athos dont l'immédiate proximité avivait à chaque pas davantage mon indicible joie d'avoir pénétré dans les bois interdits. Une légère brume d'été stagnait dans la gorge sauvage inconnue des mortels, où des oiseaux chanteurs suivaient ma difficile avance dans le torrent limpide et froid, qui formait, çà et là, de calmes bassins, reflétant d'épais taillis dominés par de noirs sapins et par des cèdres vénérables. Trempé jusqu'à la taille, menacé d'être renversé par la force des eaux, étais-je vraiment seul dans la sainte forêt ? Je me sentais accepté, jugé par des arbres plus sages et plus heureux que les hommes ! Un incroyable secret s'imposait à ma conscience pure : Dieu hantait la forêt ! En cette aurore, Il allait de branche en branche; Il visitait ses fidèles, les grands arbres tranquilles, qui Le connaissaient de toute éternité et L'adoraient en silence.

Marchant dans l'eau glacée, m'aidant d'une longue perche, au fond de cette gorge violette encore enténébrée de brume, je renaissais sans crainte entre les mains de Dieu. Le torrent bouillonnait contre mes cuisses et me lavait de la vie. Qui donc avais-je été en de multiples existences pour revenir avec une telle aisance à cette paix de commencement du monde ? Le temps d'un cri d'oiseau, je me revis à Byzance et dans la triste Europe, alchimiste à l'écoute obstinée de la puissante voix du Seigneur de Lumière, connaissant ses Lois, et l'aimant en secret. Je n'étais pas un homme semblable aux autres hommes ! Je n'avais pas comme Adam renié mon Créateur ! Vieux comme le monde, j'étais de ceux qui n'ont jamais oublié, de siècle en siècle, la douceur et la force de l'état primordial qui est celui des anges.

Certain de la profondeur millénaire de mon amour pour Dieu, assourdi par le perpétuel chant des vagues qui bondissaient sur de multiples écueils, j'allai toujours plus haut dans la montagne. J'entrai dans la région fréquentée des ermites; la forêt devenait plus silencieuse et plus froide. Près des eaux écumantes, je passai par des entailles creusées dans la roche vive; c'était une sorte d'escalier très ancien, usé, quasi taillé par des géants, verdi d'humidité, et jalonné, presque à chaque tournant, de petits reposoirs peints en bleu, à demi abandonnés dans les bois pleins d'un calme sacré. Le dernier quartier de la lune, très pâle, brillait entre les branches. Les oiseaux s'étaient tus. Loin de se dissiper avec le jour naissant, des bancs



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