Un impossible conte de fées by Han Yujoo

Auteur:Han Yujoo
La langue: eng
Format: epub
Éditeur: Decrescenzo
Publié: 2017-10-01T12:57:00+00:00

21

Le week-end est passé. Lundi revient. Jusqu’à la fin du dernier cours, le maître n’évoque pas l’affaire des journaux disparus. La joue droite de la môme est terriblement enflée. Ça date de samedi ou de dimanche. Ou de jeudi ou de vendredi. Mais personne n’y prête attention. Le maître soupçonne les oreillons. Non, à vrai dire, le maître n’en fait aucun cas. Le dernier cours est déjà terminé, mais aucun élève, au visage empourpré, ne s’est manifesté. Le maître se sent obligé de tenir compte du maudit prestige et de la dignité accordés au métier de professeur. Ses menaces avaient intimidé les élèves et maintenant, il est tenu de passer à l’acte. Personne n’est venu lui présenter des aveux, des explications ou des prétextes. Lui aussi est père d’un collégien, mais ce fait ne lui est pas utile cette fois. Il trouve ses élèves énigmatiques ; leurs visages, leurs gestes, leurs manières de parler... Bien qu’il les dévisage attentivement un par un, impossible de repérer le coupable. Qui ? Il décide de se taire. C’est une disposition provisoire. Il décide d’attendre. Pour une durée provisoire. Durant la réunion de fin de journée, il demande aux élèves de faire le ménage avec plus de minutie que d’habitude. Ceux qui ne sont pas de service s’affairent à ouvrir et fermer leurs cartables puis s’en vont. Huit d’entre eux restent. Avec une mine gênée, In-ju salue Mia d’un signe de la main. Mia, la môme et les autres mômes poussent les pupitres vers le fond. Mia, à force d’avoir pleuré tout au long du week-end, a le visage tout enflé. Elle n’a pas parlé de la journée à In-ju. Chaque fois qu’In-ju posait une question, elle bottait en touche. La môme regarde Mia de travers. Bouche cousue, Mia est en train de balayer. Des élastiques à cheveux, des gommes à crayon et des messages gribouillés sur des bouts de papier qui circulaient pendant les cours à l’insu du maître sont moissonnés à chaque coup de balai. Le maître n’est pas présent. La môme juge que c’est le moment idéal pour aborder Mia. Il faut interroger Mia. Je hais. Je hais. J’ai mal. Je déteste. Le feu est brûlant. C’est long et dur. L’aiguille est pointue. J’ai mal. Cette douleur est insupportable. J’ai aussi envie de tuer. J’en ai envie. Les mauvaises choses font mal. Ceux qui font mal sont mauvais. J’ai envie de tuer. Je déteste. J’ai mal. Je hais. Un nuage de poussière se forme au bout du balai. La môme continue de l’observer, réprimant son angoisse. « Est-ce une copine ? » avait demandé la mère de Mia à sa fille. « C’est une camarade de classe », avait-elle répondu. Pour elle, la môme n’est pas une copine. Par conséquent, Mia ne lui dira jamais ce qu’elle a vu et ce qu’elle n’a pas vu. L’esprit de Mia est envahi par l’idée du père, et encore du père, et de la mère. La môme remarque l’ongle du petit doigt de Mia.

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