Un écart De Conduite by Robin Cook

Auteur:Robin Cook [Cook, Robin]
La langue: fra
Format: epub
ISBN: 9782743623630
Éditeur: Rivages

*

« Et puis, soudain, la guerre arriva. Cela ne voulait pas dire grand-chose pour nous, sauf pour Mam’selle*. Mam’selle* était suisse ; elle était très stricte, mais pas méchante. Elle était préceptrice dans une famille russe de Saint-Pétersbourg quand la révolution est arrivée ; elle perdit tout ce qu’elle possédait, et dut aller à pied de Saint-Pétersbourg jusqu’à Athènes, où elle attrapa la typhoïde et faillit mourir. Elle n’en pouvait plus de cette guerre et elle redoutait terriblement Hitler ; elle craignait qu’il fît subir à la Suisse le même sort qu’à l’Autriche et la Tchécoslovaquie. Nous l’entendions souvent parler à Iris, mais cela n’avait guère de sens pour nous. Jusqu’à ce jour, juste avant la guerre, alors que je faisais ces exercices d’arithmétique que je détestais, tâchant de deviner quel nombre de jouets à deux pence il resterait si on en avait cinq au départ et qu’on en donnait deux ; j’avais posé mon cahier sur un numéro du Times. À chaque fois que je déplaçais mon cahier, je voyais la photo d’une ville magnifique, et finalement je demandai à Mam’selle* ce que c’était. Elle regarda la photo, la regarda encore, et une expression étrange se peignit sur son visage, et elle me dit : “München, München”, d’une voix que je ne lui avais jamais entendue auparavant, et elle se mit à pleurer…

» Ma foi, comme je vous le disais, la guerre éclata et elle durait depuis six mois, environ, lorsqu’un jour – Ô joie ! – mon oncle apparut soudain dans la salle de classe par un après-midi de printemps. Il entra en trombe dans la nursery, exubérant comme jamais, mais cette fois, à notre grand étonnement, il était habillé en marin. En regardant son uniforme, il était facile de voir, même pour nous, qu’il n’était aucunement amiral, comme j’avais imaginé qu’il le serait instantanément devenu en entrant dans la marine. À vrai dire, il n’était qu’un simple matelot – et je me souviens qu’il a dit à Iris : “Vous voyez, je peux faire tout ce que je veux, à présent, n’est-ce pas ? Et vous savez ce qu’on dit des marins ?” Et il la prit dans ses bras et lui donna un vrai baiser. Iris devint absolument écarlate, puis ils gloussèrent tous les deux comme des écoliers. Mon frère et moi étions plantés là, stupéfaits, la mâchoire pendante, et mon oncle nous dit d’une voix tonitruante : “Et alors, qu’est-ce que vous avez à traîner là, à nous regarder bouche bée, mes affreux petits microbes ?” Et il nous entraîna au rez-de-chaussée juste au moment où Mam’selle* montait l’escalier d’un pas pesant mais décidé ; en bonne Suissesse qu’elle était, elle n’avait qu’une piètre opinion de lui, j’ai le regret de vous le dire.

» Je me souviens qu’il était simplement passé pour dîner avec nous. Il venait de recevoir son affectation ; il était en route pour Chatham afin de rejoindre son bateau – et quand nous lui avons réclamé des détails – quel genre

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