Topographie de la terreur by Régis Descott

Topographie de la terreur by Régis Descott

Auteur:Régis Descott [Descott, Régis]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Fiction, Thrillers, General, Crime
ISBN: 9782809846317
Google: y9GUEAAAQBAJ
Éditeur: L'Archipel
Publié: 2023-01-18T23:00:00+00:00


Domicilié au 2 Iranische Strasse, l’hôpital juif demeurait une anomalie dans une ville officiellement Judenrein, avec l’intégralité de son personnel et la patientèle de confession juive. Gerhard en ignorait tout lorsqu’il coupa le contact de sa moto devant la façade du bâtiment principal : un édifice à la toiture surmontée à l’aplomb du fronton d’un campanile dont au moins l’horloge indiquait dix-neuf heures pile.

On l’introduisit auprès du SS-Hauptsturmführer Fritz Wöhrn, officier des affaires spéciales à la direction administrative de l’hôpital, le Judenreferat, sous-section B du département IV du RSHA, dont le rôle consistait à maintenir sur l’hôpital un contrôle absolu. Mais l’officier SS n’avait que faire d’une Juive hospitalisée après une tentative de suicide et il s’en déchargea en l’envoyant auprès de Hilde Kahan, la secrétaire du Dr Lustig qui dirigeait l’hôpital et ses équipes.

Passant d’un bureau à l’autre, Gerhard découvrit un ensemble de bâtiments intacts, disposés autour d’un vaste jardin converti en potager. Comme la totalité du personnel dont chaque uniforme ou blouse arborait l’étoile jaune, Hilde Kahan portait la sienne à l’endroit réglementaire au niveau du cœur, mais elle n’avait pas cet air résigné que cette flétrissure provoquait souvent. Le front haut, le regard fier et décidé, toute sa personne dégageait une énergie évidente, sans doute indispensable à un poste aussi exposé.

— Frau Regensburg ? Vous arrivez trop tard. Elle est morte il y a quelques heures.

— Pourrais-je la voir ?

À peine surprise par la requête ou n’en montrant rien, elle décrocha son téléphone et demanda qu’on lui prépare le cadavre. Puis elle contourna son bureau et invita Gerhard à la suivre dans un dédale de galeries et de couloirs où s’affairaient quantité de personnels, infirmières poussant des chariots, infirmiers des brancards, médecins donnant des instructions à des plus jeunes, patients désœuvrés, la plupart la saluant à son passage.

— Nous sommes à l’étroit depuis la réquisition par la Wehrmacht de trois de nos pavillons pour le Lazarett n° 147, expliqua-t-elle tandis qu’il s’efforçait de suivre son rythme. Nous avons dû reloger les services de Gynécologie et de Maladies infectieuses ainsi que les infirmières. Mais, grâce à ça, nous bénéficions d’un approvisionnement prioritaire en électricité ainsi que du chauffage. Une aubaine, ajouta-t-elle sur un ton dans lequel Gerhard décela un soupçon d’ironie.

Ils s’engagèrent dans un escalier menant au sous-sol.

— C’est rare que la police s’intéresse à l’un de nos suicidés. L’immense majorité meurt dans l’indifférence, souvent sur un brancard oublié dans un couloir parce qu’on manque de personnel pour s’en occuper. Et pourtant, chacun représente un dilemme insupportable : faut-il vraiment tout faire pour tenter de les sauver, alors qu’on sait à quoi ils ont voulu échapper ? Frau Regensburg, une relocalisation à l’Est, sans famille… Nous y voici.

Elle poussa une porte battante et ils se retrouvèrent dans une odeur de phénol face à un pan de mur occupé par des casiers aux portes métalliques. Un jeune homme à la blouse cousue d’une étoile jaune se redressa en la reconnaissant et se dirigea vers un brancard sur lequel reposait un cadavre qu’il découvrit avec lassitude.



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