Terminus Saint-City by Saintcrow Lilith

Terminus Saint-City by Saintcrow Lilith

Auteur:Saintcrow,Lilith [Saintcrow,Lilith]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Fantasy urbaine
ISBN: 9782360510641
Éditeur: AlexandriZ
Publié: 2007-11-01T00:00:00+00:00


17

Je massai mon épaule engourdie, tout en me fondant dans l’ombre d’une grande haie de houx, et surveillai l’intersection de la Cinquième et de Chesko, dans l’East Side. Ma peau hypersensible me picotait presque, et mon cœur battait un peu trop rapidement. Le contact glacé du bracelet à mon poignet gauche n’arrangeait pas les choses. Impossible d’oublier la sensation du métal froid et lisse.

Ce n’était que la deuxième fois que je m’aventurais sur la rive est du fleuve, depuis que j’avais embarqué toute jeune sur la navette qui m’emporta à l’Académie. Je réprimais un pincement de culpabilité à chaque fois que je songeais à l’endroit où je me trouvais. Sans surprise, je m’aperçus que mes mains tremblaient un peu. Je finis par les immobiliser en serrant les doigts autour du fourreau de mon sabre, et revins à ma surveillance. Le slicboard que j’avais volé – un très bon Chervoyg lourd et profilé – reposait contre la haie à côté de moi, verrouillé magiquement. Je l’avais dérobé sur un râtelier, devant un club de yuppies situé dans le Tank District. Un gosse de riche gâté serait probablement obligé de prendre un hovercab pour rentrer chez lui. Je n’avais pas volé le slic d’un coursier.

J’attendais, les articulations de mes doigts presque blanches à force de serrer le fourreau. Je priai pour qu’il ne fût pas trop tard.

Je n’avais même pas pu profiter de mon vol à slicboard. Dans le temps, j’avais l’habitude de me détendre ainsi en slalomant entre les lignes de circulations aériennes après mes séances de nécromancie, jusqu’à ce que l’adrénaline qui irradiait mon cœur et mon cerveau me convainque que j’étais vivante. Cette fois, la vitesse folle et la sensation de me tenir en équilibre au milieu des étoiles, genoux ployés et bras légèrement écartés, m’avaient semblé étrangement fades.

Peut-être parce que j’étais revenue dans l’East Side. Du même côté que le Hall des Manipulations.

Je regardai une nouvelle fois par-dessus mon épaule, scrutant la rue vide noyée par la lumière des réverbères. À tout instant, je pouvais entendre des bruits de pas furtifs, ou sentir une odeur de craie, de tripes, et d’après-rasage.

Arrête avec ça, Danny. Mirovitch est mort. C’est toi qui l’as tué. Tu as fait exploser son ka et Japhrimel a incinéré le corps de Lourdes. Il a réduit le Hall des Manipulations en cendres jusqu’à la dernière pierre. Il a effacé cet endroit maudit de la carte. Alors arrête. Arrête.

D’autres souvenirs, différents, resurgirent. Japh me touchant doucement le dos, ses doigts collés contre mes muscles tendus presque à se rompre, pendant que je sanglotais en essayant de repousser loin de mon crâne vulnérable les stigmates du viol psychique par Mirovitch. Mes propres poings obstinément fermés, mes crises délirantes à chaque fois que je revivais ces moments, Japhrimel qui m’emprisonnait doucement, mais fermement, les poignets pour m’empêcher de me cogner la tête contre les murs. Le pouls qui battait à sa gorge alors que nous demeurions tous les deux étendus dans l’obscurité, sa voix semblable à un filet d’or m’empêchant de sombrer dans la folie.



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