Spartacus by Fast Howard

Auteur:Fast, Howard [Fast, Howard]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Roman historique
ISBN: 9782841721078
Google: BJCHPwAACAAJ
Amazon: 156324599X
Éditeur: L'Atalante
Publié: 1996-10-01T22:00:00+00:00

III

La lumière du jour apaise les craintes et les inquiétudes, et agit le plus souvent comme un baume bienfaisant. Le plus souvent, mais pas toujours ; car il existe certaines catégories de personnes qui accueillent sans plaisir la venue du jour. Le prisonnier chérit la nuit et se blottit dans le manteau dont elle l’entoure, et le condamné voit sans joie venir l’aube. Mais pour la plupart des humains, le jour vient dissiper les incertitudes de la nuit. Les grands hommes endossent de nouveau chaque matin le manteau de leur grandeur, car même eux deviennent la nuit comme les autres hommes, et d’aucuns se livrent même à des actions peu recommandables, tandis que d’autres pleurent ou se pelotonnent sur eux-mêmes tant ils craignent la mort et des ténèbres plus épaisses encore que celles qui les entourent. Mais le matin, ils redeviennent grands, et Gracchus, assis sur la terrasse, drapé dans les plis d’une toge étincelante, son gros visage arborant une expression de joyeuse assurance, était l’image même de ce que devait être un sénateur romain. On a bien des fois dit et répété que jamais on ne vit assemblée plus noble et plus sage que le Sénat de la république Romaine ; et quand on voyait Gracchus, on souscrivait volontiers à ce jugement. Bien sûr, il n’était pas né noble et le sang qui coulait dans ses veines avait des origines fort douteuses, mais il était très riche et la république se vantait d’apprécier chez ses serviteurs leur valeur individuelle tout autant que la qualité de leurs ancêtres. Le fait même que les dieux donnent la richesse à un homme était le signe qu’il possédait des qualités innées et, si l’on en voulait la preuve, il n’était que de voir combien les pauvres étaient nombreux alors qu’il y avait si peu de riches.

Gracchus fut bientôt rejoint par les autres hôtes qui honoraient également de leur présence la Villa Salaria. C’était une assemblée assez extraordinaire, et chacun des invités avait parfaitement conscience d’être un personnage remarquable et important. Cela les mettait à l’aise et cela renforçait encore la confiance qu’ils avaient en Antonius Caius qui ne commettait jamais l’erreur de mélanger indûment les invités. Il fallait reconnaître que ceux-ci étaient en l’occurrence passablement exceptionnels. Il est vrai que parmi eux se trouvaient deux des hommes les plus riches du monde, une jeune femme qui allait devenir une courtisane fameuse, un jeune homme qu’une vie de calculs, de complots et d’intrigues allait rendre célèbre pour des siècles à venir, et un autre jeune homme dont le caractère dégénéré allait lui assurer aussi une sorte de célébrité ; mais on trouvait presque toujours à la Villa Salaria une compagnie aussi choisie.

Ils étaient groupés ce matin-là autour de Gracchus. Il était le seul parmi eux à porter une toge. Il était le magistrat inamovible, installé avec son eau parfumée, en train de peler une pomme et accordant un mot à l’un et à l’autre. Ils se remettent vite d’aplomb, se dit-il, en regardant les

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