Sommes-nous tous des criminels ? by André Kuhn

Sommes-nous tous des criminels ? by André Kuhn

Auteur:André Kuhn [Kuhn, André]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Essai
ISBN: 978-2-940063-66-6
Éditeur: Les Éditions de l’Hèbe
Publié: 2002-11-01T00:00:00+00:00


16 – Peut-on prévenir

la criminalité

par des peines sévères ?

Bien des gens pensent que les sanctions pénales (c’est-à-dire les amendes, les peines de prison, etc.) ont un effet d’intimidation et sont donc préventives. De manière générale, un tel effet d’intimidation peut s’exercer sur deux catégories de personnes : d’une part, les délinquants condamnés et, d’autre part, l’ensemble de la population. En effet, en infligeant une sanction à un délinquant, le juge estime qu’elle lui permettra de prendre conscience de la gravité de son acte et lui enlèvera toute envie de recommencer. C’est ce que l’on appelle la prévention spéciale. Mais la connaissance de la sanction pénale peut également dissuader l’ensemble des auteurs potentiels (c’est-à-dire chacun de nous) de commettre la même infraction. C’est ce que l’on appelle la prévention générale.

Toutefois, l’effet préventif n’augmente pas linéairement avec la sévérité des peines(86). De surcroît, la sévérité n’est pas l’unique facteur qui influence le degré de prévention d’une sanction. En effet, selon certains auteurs – néanmoins minoritaires dans la littérature scientifique –, en matière de prévention spéciale, ce que l’on appelle la célérité – c’est-à-dire la rapidité avec laquelle une sanction est prononcée après la commission de l’infraction –, est également importante. Ainsi, plus une peine est prononcée rapidement, plus le condamné comprendrait pourquoi il est puni.

Ce point de vue, qui s’applique manifestement à un chien qui peinerait à comprendre une punition qui interviendrait longtemps après l’acte qu’elle est censée sanctionner, est toutefois peu compatible avec la capacité qu’a l’être humain de comprendre les liens – même lointains – existants entre les choses.

La prévention spéciale, comme la prévention générale, dépendent donc principalement de la sévérité et de la certitude de la peine. Par certitude, il faut comprendre qu’il est nécessaire que les auteurs potentiels soient persuadés qu’ils courent un grand risque de se faire arrêter par la police. Si, au contraire, ils estiment qu’il n’existe aucun risque, ils n’hésiteront pas à commettre leur crime, même si la peine qu’ils encourent est très sévère.

C’est d’ailleurs à l’absence de cette certitude de la sanction que certains criminologues attribuent, en partie, la délinquance juvénile. En effet, on pense parfois que la “démission” des parents, des enseignants et de la société en général dans le domaine de l’éducation des jeunes influence la criminalité. De manière générale, la société sanctionne de moins en moins les comportements déviants tels que le fait de dire des mots injurieux ou de jeter des déchets par terre. On dit alors que le contrôle social s’amoindrit et que les gens se permettent des choses qu’ils n’auraient certainement pas osé faire auparavant. La même idée permet d’ailleurs aussi d’expliquer pourquoi le phénomène criminel est plus connu dans les villes qu’à la campagne. En effet, dans les petits villages de campagne, le contrôle social est souvent beaucoup plus fort que dans les grandes villes, où les relations sont généralement plus anonymes.

Reste encore à déterminer si les considérations théoriques présentées ici se vérifient en pratique. C’est ainsi que l’on peut mentionner les recherches sur l’effet préventif de la peine capitale aux États-Unis.



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