Sociologie du développement by Copans

Sociologie du développement by Copans

Auteur:Copans
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Armand Colin


2. La reconfiguration des États et les nouveaux acteurs politiques locaux

Les politiques économiques internationales des années 1975-1990 ont complètement transformé les mécanismes institutionnels et politiques du développement et, ce faisant, transformé les modèles d’organisation sociale et de valeurs de la plupart des sociétés concernées. L’objet central de ces remodelages et reconfigurations est d’abord l’État national au sens global du terme, le champ de ses interventions et de ses prérogatives bien sûr (les déficits liés aux dépenses sociales ou de fonctionnement, les sociétés d’État sources de rentes et non de profits, etc.), mais aussi la composition sociologique de ses acteurs (fonctionnaires, salariés, leurs niveaux de qualification) et des catégories politiques qui ont la haute main sur les appareils bureaucratiques et les institutions gouvernementales (représentants « populaires », cliques militaires, bureaucratiques voir mafieuses). La sociologie de l’État se transforme, mais ce sont les sciences politiques qui ont tenu le journal de bord de ces mutations. La littérature sur la définition des systèmes politiques et des États non occidentaux est enfin sortie de la répétition mimétique des modèles brutalement importés, mais elle est restée très abstraite et fondée essentiellement sur l’examen des mécanismes du fonctionnement formel et de la répartition des pouvoirs entre les grandes catégories sociopolitiques11.

Une problématique inspirée de M. Weber et de M. Foucault, de sociologie historique politiste, nous permet de prendre en considération l’ensemble des mécanismes qui favorisent aujourd’hui les dynamiques de privatisation aussi bien aux niveaux économique et social qu’aux niveaux proprement politique et étatique12. Pour B. Hibou, la privatisation des États correspond surtout à une nouvelle définition des distinctions entre public et privé, entre économique et politique, entre licite et illicite (1999, p. 14) et, adaptant la notion ou le concept de décharge employé par M. Weber à propos de certains cas de féodalité, elle constate que, selon ce dernier, « cette modalité d’exercice du pouvoir, qui évite notamment le coût d’un appareil administratif important, était […] historiquement courante. Elle n’était en rien synonyme d’absence d’État ou de gouvernement, mais était caractéristique de situations ou de moments historiques beaucoup moins bureaucratisés, ne s’appuyant pas ou peu sur un appareil gestionnaire » (ibid., p. 34). De nombreux exemples africains, maghrébins, asiatiques, latino-américains ou européens (Pologne, Russie) confortent cette nouvelle grille de lecture qui tient compte de l’ensemble sociétal et non pas de la seule image idéologique de la fameuse déliquescence de l’État face à la mondialisation.

L’hypothèse de la privatisation a le mérite de mettre en lumière le rôle de nouveaux acteurs « privés » dans le développement qui chevauchent le public et le privé. Mais cette configuration socio-institutionnelle n’est en rien homogène : A. Dubresson et Y. A. Fauré nous rappellent opportunément qu’il ne faut pas confondre décentralisation et développement local (2005, p. 7-20). Ils nous rappellent également, que le développement local n’a pas encore fait la preuve d’une plus grande efficacité que le développe ment dirigé centralement : non seulement nous manquons d’instruments méthodologiques pour engager de véritables comparaisons, mais la diversité des cas de figure, y compris



Télécharger



Déni de responsabilité:
Ce site ne stocke aucun fichier sur son serveur. Nous ne faisons qu'indexer et lier au contenu fourni par d'autres sites. Veuillez contacter les fournisseurs de contenu pour supprimer le contenu des droits d'auteur, le cas échéant, et nous envoyer un courrier électronique. Nous supprimerons immédiatement les liens ou contenus pertinents.