Que veulent les femmes ? by Daniel Bergner

Que veulent les femmes ? by Daniel Bergner

Auteur:Daniel Bergner [Bergner, Daniel]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Hugo & Cie - 2014
Publié: 2015-01-20T16:00:00+00:00


***

Un des fantasmes de Ndulu : « Un homme blanc, sans visage, me pousse violemment contre le mur et m’immobilise avec le coude tandis qu’il masturbe son sexe dressé. Il me murmure à l’oreille tous les trucs horribles qu’il va me faire subir. M’enfoncer son sexe brûlant dans la chatte jusqu’à la garde ; si je ne me tiens pas tranquille, il va appeler son copain qui attend dehors, l’oreille collée à la porte en se masturbant comme un fou, et celui-ci va entrer pour me baiser aussi. Tu aimerais ça, hein ? me lance-t-il. Prendre deux grosses bites à la fois ? Il m’embroche brutalement par l’arrière, debout. Dès qu’il commence à jouir et à crier, son copain ouvre la porte et me pénètre violemment l’anus. Ils gémissent de plaisir si fort qu’on dirait des sanglots. »

Un fantasme ordinaire pour Ndulu… La violence des hommes, leur irrépressible envie de baiser, leurs orgasmes dont les cris rappelaient « des sanglots », tout cela l’excitait tout en lui causant une douleur infinie, la douleur de sa couleur de peau. Ndulu avait grandi dans une concession aménagée par une compagnie pétrolière américaine en Afrique occidentale et, plus tard, en Europe. Après des études dans le Midwest, aux États-Unis, elle avait rejoint New York et décroché un emploi d’artiste graphique. Durant son enfance, son adolescence et sa vie de jeune femme, elle avait été conduite à penser que la couleur de sa peau, ses traits, ses cheveux présentaient une image allant, estimait-elle, du tolérable à l’intolérable. Elle était surtout complexée par sa peau. « En hiver, précisait-elle, elle s’éclaircit. Mais en été, quoi que je fasse, elle devient plus foncée. En été, je déteste me regarder dans la glace. »

Sa mère n’avait cessé de lui répéter qu’une peau claire était plus attirante qu’une peau foncée. Au cours de sa propre enfance, la mère de Ndulu avait vu le regard envieux de sa mère admirer le visage pâle de la tante de Ndulu. « Dans les familles de couleur, affirmait Ndulu, c’est toujours le même problème. C’est comme ça en Afrique. Ma tante était la plus belle du village parce qu’elle avait la peau la plus claire. Ma grand-mère passait son temps à la choyer. »

Devenue adolescente, Ndulu avait fait ce que faisaient toutes les filles des villes d’Afrique occidentale, ce que sa mère lui avait appris avant même qu’elle ne commence à parler. Afin de démêler ses cheveux crépus, elle appliquait une graisse couleur mayonnaise. « Presque de la consistance du beurre, épaisse, grasse, il fallait en mettre une couche épaisse, qui dégoulinait sur le visage dès que vous alliez au soleil. »

Aujourd’hui à New York, elle essayait de s’en passer en faisant couper ses cheveux très courts, mais elle n’avait pas renoncé à sa mixture. Elle n’y comptait pas, d’ailleurs. « C’est courant, je ne connais pas une seule femme de couleur qui n’en applique pas. C’est un truc qu’on doit faire si on veut que nos cheveux s’éclaircissent. Je déteste ça, ça me rappelle ce que je suis, et ce que je ne suis pas.



Télécharger



Déni de responsabilité:
Ce site ne stocke aucun fichier sur son serveur. Nous ne faisons qu'indexer et lier au contenu fourni par d'autres sites. Veuillez contacter les fournisseurs de contenu pour supprimer le contenu des droits d'auteur, le cas échéant, et nous envoyer un courrier électronique. Nous supprimerons immédiatement les liens ou contenus pertinents.