Quand les poules auront des dents by Stephen Jay Gould

Quand les poules auront des dents by Stephen Jay Gould

Auteur:Stephen Jay Gould [Gould, Stephen Jay]
La langue: fra
Format: epub
Tags: essai
ISBN: 2213665966
Éditeur: Fayard
Publié: 1984-01-01T16:01:11+00:00


Soupçons

J’avais juste l’âge des passions primales – douze ans – et j’étais un paléontologiste en herbe lorsque le New York Times révéla la supercherie à la « une », un beau matin, au petit déjeuner. Mon intérêt pour cette affaire n’est jamais retombé depuis lors, et j’ai interrogé au fil des ans de nombreux paléontologistes blanchis sous le harnois au sujet de Piltdown. J’ai aussi remarqué, avec amusement et étonnement, que rares étaient ceux qui croyaient la version officielle selon laquelle Dawson aurait monté seul toute cette affaire. J’ai noté en particulier que plusieurs des hommes que j’admire le plus soupçonnent Teilhard, moins en raison des faits (leurs doutes s’appuient sur ce que je considère, quant à moi, comme les faiblesses de l’argumentation), mais en raison de leur sentiment intuitif à l’égard d’un homme qu’ils ont bien connu, aimé et respecté, mais dont la piété semblait cacher une passion, un mystère et un certain goût pour la plaisanterie. A.S. Romer et Bryan Patterson, deux des principaux spécialistes américains de la paléontologie des vertébrés, et qui furent mes collègues à Harvard, m’ont souvent fait part de leurs soupçons. Louis Leakey me les a exprimés dans ses écrits, sans citer de nom, mais on ne peut plus clairement pour un lecteur averti (voir son autobiographie, By the Evidence9).

Après avoir écrit un article sur Piltdown, mais pour d’autres raisons (Natural history, mars 1979), je finis par décider d’ajouter moi aussi mon grain de sel à l’affaire et d’aller voir un peu de quoi il retournait. Je lus donc tous les documents officiels et en arrivai à la conclusion que rien n’excluait Teilhard de cette affaire, mais que rien non plus, hormis sa présence à Piltdown dès le départ, ne le mettait particulièrement en cause. Mon intention était de laisser tomber le sujet ou de passer le flambeau à quelqu’un de plus motivé que moi pour les enquêtes. Mais, à une conférence qui se tenait en France en septembre dernier, je rencontrai par hasard deux des plus proches collègues de Teilhard, l’éminent paléontologiste J. Piveteau et le grand zoologiste P.P. Grassé. « Incroyable10 », fulminèrent-ils que je leur fis part de mes soupçons. Puis le père François Russo, ami de Teilhard et jésuite lui-même, eut vent de mon enquête et promit de m’envoyer un document qui prouverait l’innocence de Teilhard : la copie d’une lettre écrite par Teilhard à Kenneth Oakley le 28 novembre 1953. Je reçus, cette lettre dans sa version française imprimée (Teilhard l’écrivit en anglais) en octobre 1979 et m’aperçus aussitôt qu’elle comportait une contradiction (une gaffe de Teilhard), qui était très facilement résolue, toutefois, si l’on admettait qu’il avait été complice. Quand je rendis visite à Oakley à Oxford, en avril 1980, il me montra l’original de cette lettre en même temps que d’autres lettres que lui avait adressées Teilhard. Nous étudiâmes les documents et passâmes la plus grande partie de la journée à parler de Piltdown ; je repartis convaincu que Romer, Patterson et Leakey avaient eu raison. Oakley,



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