Pourtant maman savait by James Lisa

Pourtant maman savait by James Lisa

Auteur:James, Lisa [James, Lisa]
La langue: fra
Format: epub
ISBN: 9782824649849
Google: bUTCAAAAQBAJ
Éditeur: City Edition
Publié: 2013-09-17T22:00:00+00:00


12

Maman m’avait abandonnée à papa, et maintenant qu’il abusait de moi sans pitié, sa situation à elle s’en trouvait améliorée. Il était toujours aussi imprévisible, irascible et violent, fracassant tout ce qui lui tombait sous la main et hurlant à faire trembler les murs de la maison, mais, depuis qu’il lui avait cassé les dents, il avait tenu parole et ne levait plus la main sur elle.

C’était moi, à présent, la cible de ses crises de rage, sauf qu’il prenait garde de ne pas me frapper à la figure.

À ce stade, je continuais d’aller à l’école de façon épisodique. S’il m’avait fait un coquart ou laissé toute autre marque visible, les services sociaux auraient ouvert une enquête, et il le savait certainement.

Papa avait beau être un monstre, il n’était pas stupide au point de se faire pincer alors qu’il pouvait m’infliger des blessures à des endroits invisibles. Il s’était procuré une tapette à mouches avec laquelle il me frappait jusqu’à ce que j’aie le dos et les fesses couverts de boursouflures rouges.

Parfois, c’est à peine si je pouvais m’asseoir tant j’avais mal aux fesses. Il avait également pris l’habitude de me mordre, laissant partout sur mon corps la marque violette de ses dents.

Je savais que papa attendait impatiemment le moment où je quitterais définitivement l’école, car alors les chances pour que les services sociaux interviennent dans ce qu’il considérait comme une affaire strictement privée seraient quasi nulles, et il pourrait sans crainte exercer sur moi sa domination.

Le collège était mon unique refuge ; quand papa m’interdisait d’aller en classe, j’étais au désespoir. J’aimais tellement apprendre. L’anglais et le théâtre étaient mes matières préférées. J’aimais lire à voix haute devant la classe, et Mlle Connelly, notre professeur, me disait souvent que j’aurais dû être comédienne.

À l’heure du déjeuner, j’allais parfois à la bibliothèque pour feuilleter des pièces de théâtre que je lisais en imitant tous les personnages. Je rêvais de pouvoir les interpréter un jour sur scène. J’avais trouvé une brochure consacrée au Théâtre national pour la jeunesse, mais je n’osais espérer que je pourrais un jour assister à l’un de leurs ateliers d’été. Les cours de théâtre étaient les seuls moments où j’arrivais à oublier complètement mes problèmes. Je m’en voulais de me laisser maltraiter par papa. Je me sentais salie, et c’était un soulagement pour moi de pouvoir entrer dans la peau de quelqu’un d’autre pendant une demi-heure, fût-ce celle d’un arbre se balançant dans le vent !

La petite salle de théâtre du collège était entièrement rouge avec de gros projecteurs accrochés au plafond. Quand nous les allumions, une odeur âcre de poussière brûlée se répandait dans l’air, et tout le monde se mettait à tousser et à cracher, mais pour moi c’était l’odeur même du théâtre : le masque et l’illusion.

Un jour, les gens de l’atelier de musique et de théâtre ont décidé de monter ensemble The Boy Friend, une comédie musicale qui se passe sur la Côte d’Azur dans les années 1920. Malgré mes absences répétées, il fut décidé que je tiendrais le rôle de lady Brockhurst, l’épouse autoritaire.



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