Pourquoi la Terre est ronde by Alain Riazuelo

Auteur:Alain Riazuelo [Riazuelo, Alain]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Science, General, Earth Sciences, Astronomy, History, Physics, Astrophysics
ISBN: 9782379310324
Éditeur: Humensis
Publié: 2019-05-13T22:00:00+00:00

Les preuves de la révolution terrestre

La condamnation de Galilée est inacceptable, mais ses prises de position présentaient un point faible : si le système héliocentrique apparaît effectivement comme plus naturel, plus simple, plus logique au vu des observations de Galilée, Kepler et Tycho Brahé, à aucun moment le déplacement de la Terre n’est prouvé explicitement. Cette absence de preuve irréfutable permit à l’Église de critiquer Galilée qui défendait l’héliocentrisme comme un fait établi avec certitude alors qu’il n’était à ce moment-là encore qu’une hypothèse – convaincante, certes, mais une hypothèse malgré tout. Galilée était lui-même conscient du problème et avait proposé que les marées soient une preuve du mouvement de la Terre : les masses océaniques pourraient réagir avec retard au déplacement de la Terre, et le niveau des mers être plus élevé sur l’arrière de sa trajectoire que sur l’avant. Mais un tel argument était facile à réfuter : si cette hypothèse était vraie, alors on ne devrait observer qu’une marée par jour, or il en existait deux, et elles n’étaient pas séparées de douze heures, mais de douze heures et vingt-cinq minutes. En fait, comme on l’a vu plus haut, le phénomène de marées n’est pas synchronisé sur la journée (ou la demi-journée), mais sur la position de la Lune : au bout de deux oscillations de marées, soit vingt-quatre heures et cinquante minutes, la Lune se trouve dans la même position dans le ciel par rapport au lieu d’observation.

Si l’on s’en tient à l’un des arguments présentés par l’Église, Galilée avait effectivement échoué à prouver le mouvement de la Terre. La première preuve que la Terre se déplace effectivement par rapport au Soleil viendra près d’un siècle après la parution du Dialogue, avec l’astronome britannique James Bradley (1693-1762). L’histoire dit que lors d’une traversée en bateau celui-ci observa que la direction vers laquelle flottait un drapeau placé en haut du mât changeait alors que le bateau prenait de la vitesse. La raison était simple : la direction du vent qu’indiquait le drapeau ne représentait pas la direction du vent par rapport au sol, qui ne changeait pas, mais la composée de cette direction constante et de la vitesse du bateau. Cet effet est de nos jours très facile à observer, avec la pluie. En l’absence de vent, la pluie tombe à peu près verticalement, cela n’est plus vrai quand on est en voiture : plus on va vite, plus la pluie semble tomber suivant une direction inclinée. Le génie de Bradley fut de transposer cet effet à la lumière elle-même, dont l’astronome danois Ole Christensen Rømer (1644-1710) avait prouvé près de cinquante ans plus tôt, en observant le ballet des satellites de Jupiter, qu’elle se déplaçait à une vitesse grande mais finie. Les satellites semblaient effectivement collectivement être en avance sur leur orbite quand la Terre était au plus près de Jupiter, et en retard quand la Terre était au plus loin, conséquence que la lumière qu’ils envoyaient à la Terre mettait plus de temps à nous parvenir.

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