Pour lire Jacques Lacan by Philippe Julien

Pour lire Jacques Lacan by Philippe Julien

Auteur:Philippe Julien [Julien, Philippe]
La langue: fra
Format: epub
Publié: 2014-09-14T16:00:00+00:00


Le sujet de la science

« L’inconscient est ce chapitre de mon histoire qui est marqué par un blanc ou occupé par un mensonge : c’est le chapitre censuré. Mais la vérité peut être retrouvée », écrivait Lacan dans le rapport de Rome(170). Et où donc retrouvée, sinon par les formations de l’inconscient, en tant qu’analysées !

Ainsi, grâce au pouvoir de la parole, l’analyse est par l’interprétation un dire de vérité là où il fut absent, soit la reconnaissance du désir par un autre désir. Processus de substitution d’une parole pleine à une parole vide, du bien-entendu au mal-entendu, l’analyse serait l’instauration d’une continuité intersubjective : rien de moins que celle du discours où se constitue l’histoire du sujet.

De quel sujet s’agit-il donc ? Du sujet même de l’énonciation dans et par la relation intersubjective. Il y a en effet la supposition – surprenante alors ! – du pouvoir de la parole interlocutive, pouvoir à la fois créatif et illuminateur, celui même de l’ordre symbolique en son primat sur l’imaginaire. L’enjeu était là : désengluer la praxis analytique de la relation imaginaire où elle s’était dévoyée. Éthique de vérité, où se dévoilerait l’infinitude du désir au-delà de la demande portant sur l’objet du besoin.

Or, dans quel contexte historique cet enjeu est-il posé ? Dans celui de « l’aliénation la plus profonde du sujet de la civilisation scientifique »(171). Là, le sujet perd son sens dans les objectivations du discours (y compris dans celles du discours de Freud !). Il s’y oublie et méconnaît dans une fausse communication le sens particulier de sa vie. Ainsi, là où le mur du langage s’oppose à la parole, l’analyse permet à la parole subjective de renverser ce mur.

D’où les questions : la psychanalyse, en remédiant aux effets subjectifs de la science, serait-elle contre elle ? Faut-il revenir à la notion ancienne d’épistémè (celle du Théétète) par-delà la science moderne (celle de Galilée et de Newton) ? Quel rapport enfin le symbolique a-t-il avec le réel ? Autant de questions qui ne peuvent longtemps être laissées en suspens : « La psychanalyse a joué un rôle dans la subjectivité moderne et elle ne saurait le soutenir sans l’ordonner au mouvement qui dans la science l’élucide(172). »

Mais alors, dans cette ordination, de quelle subjectivité s’agit-il ?

À partir de 1964, Lacan tranche : il n’y a pas de relation intersubjective ; le sujet n’est pas ce qui est supposé par un autre sujet. Constatant « l’effet de relâchement » subi par sa propre thématique à mesure de sa diffusion sous le nom de « lacanisme », il y pare par cette affirmation : « Le sujet sur quoi nous opérons en psychanalyse ne peut être que le sujet de la science »(173), soit celui qui est né pour la première fois en Occident au XVIIe siècle sous son nom de cogito cartésien. Il s’est passé à ce moment-là un événement sans lequel personne ne parlerait de Freud, parce que sans cet avènement du cogito cartésien, Freud n’aurait pas



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