Petits Suicides Entre Amis by Arto Paasilinna

Petits Suicides Entre Amis by Arto Paasilinna

Auteur:Arto Paasilinna [Paasilinna, Arto]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Folio
Publié: 2014-08-04T16:00:00+00:00


18

Le transporteur Rauno Korpela, la mine grave, pressa le groupe de remonter dans l’autocar :

« Il serait temps d’y aller. La mort nous attend. »

Le luxueux pullman de la Flèche du Tourisme s’emplit, s’anima, se contorsionna un instant sur le parking du cimetière, puis se glissa dans le Bot de la circulation. Le colonel Hermanni Kemppainen le suivit en voiture à travers la ville de Kotka, puis sur les ponts enjambant les bras de mer et la route de Porvoo. Korpela fila d’une traite vers Loviisa et Helsinki, qu’il contourna de loin car personne n’avait rien de particulier à y faire. Il prit ensuite la route de Pori et continua droit jusqu’à Huittinen, où il emplit son réservoir d’une demi-tonne de gazole pendant que ses passagers se ravitaillaient en café et en sandwichs au self de la station-service.

Vers dix heures du soir, l’autocar arriva à Pori. Korpela mit le cap sur la zone industrielle, franchit la grille de son entreprise de transports et gara son bus dans la cour où stationnaient six autres véhicules aux couleurs de la Flèche du Tourisme. Le dépôt était désert.

« C’est avec cette flotte que j’ai arraché ma croûte à l’asphalte des routes », expliqua Korpela dans le micro.

La visite prit fin. Le transporteur ne descendit même pas du pullman. Il regarda un moment ses autocars, laissa échapper un petit rire sans joie et regagna la route en marche arrière.

Le colonel Kemppainen prit provisoirement congé du reste de la troupe pour passer chez lui à Jyväskylä. L’on se retrouverait le surlendemain à Kuusamo. La directrice adjointe Helena Puusaari se proposa pour lui tenir compagnie.

Après que l’autocar eut quitté Pori, l’extra Seppo Sorjonen découvrit en feuilletant les classeurs une intéressante Cal-te postale qui représentait des visons en train de jouer. Son expéditeur était un certain Sakari Piippo, de Närpiö. D’une écriture anguleuse, il avait rédigé au dos de la carte ce laconique message :

« Je dois être maudit, j’ai beau faire de mon mieux, rien ne marche, bordel. Contactez-moi si ça vous chante. Sakari Piippo. Närpiö. »

À Närpiö, tout le monde connaissait Sakari Piippo, le directeur de cirque raté. Il habitait en lisière du bourg, dans une ferme relativement récente. En bordure d’un champ s’étendait un vaste élevage d’animaux à fourrure. Mais on ne voyait dans les cages ni visons ni renards. Plus loin se dressait une vieille étable et, derrière, une haute grange. Rien n’indiquait qu’il puisse y avoir là un cirque.

Malgré l’heure déjà tardive, Sorjonen et Rellonen allèrent jeter un coup d’œil à l’intérieur de la maison. Ils y trouvèrent le maître des lieux, un quadragénaire à l’air bougon, vêtu d’un pull-over et d’une culotte de cheval. Assis dans un fauteuil à bascule, il lisait la Gazette de l’Ostrobotnie. Il avait la mine grave, comme la plupart des suicidaires. Sakari Piippo n’évoquait en rien un directeur de cirque.

Après les présentations, l’homme offrit du café à ses visiteurs. Il lava des tasses en s’excusant de ne pas avoir eu le courage de faire le ménage ces derniers temps, depuis qu’il était seul.



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