Petite histoire du christianisme médiéval by Jean Wirth

Petite histoire du christianisme médiéval by Jean Wirth

Auteur:Jean Wirth [Wirth, Jean]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Littérature
Éditeur: Labor et Fides
Publié: 2018-11-15T00:00:00+00:00


Le sort des âmes

Il est difficile de dire ce qu’apporte le Jugement dernier au sort des morts. Il y a bien la résurrection de la chair, mais elle n’est nécessaire ni à la béatitude ni à la damnation qui surviennent dès le décès. Pour de nombreux esprits imprégnés de néoplatonisme, elle n’est pas forcément préférable à la vie spirituelle de l’âme séparée du corps. À première vue, la persistance du thème du Jugement est paradoxale, d’autant plus que les commentaires de l’Apocalypse, pour éviter toute critique millénariste des institutions, tendent à confondre la domination actuelle de l’Église avec le règne du Christ, comme s’il n’était pas à venir(5). Comme nous l’avons vu, il s’agit sans doute de ne pas réduire la chair à une pure négativité.

Le contrôle exercé par l’Église sur les vivants et les morts explique peut-être le faible développement des conceptions de l’au-delà qui restent longtemps obscures. De fait, les chrétiens sont jugés non seulement avant le Jugement dernier, mais avant même leur mort, par la présence à la table de communion ou par l’excommunication, la mainmise des églises sur les cimetières privant les excommuniés de l’enterrement en terre bénite. La justice céleste ne fait alors que confirmer celle de l’Église.

Mais ce contrôle resterait faible s’il n’y avait que le choix entre une vie parfaitement chrétienne et l’exclusion de la communauté. Toutes les fautes ne peuvent entraîner la damnation et il faut pouvoir traiter au ciel aussi les manquements ordinaires avec des peines proportionnées. Il s’ensuit que la conception des pénitences imposées sur terre aux pécheurs et celles des châtiments de l’au-delà sont étroitement liées.

Comme nous l’avons vu, Augustin imagine déjà des châtiments intermédiaires dans l’au-delà, tout en hésitant sur la possibilité d’un châtiment temporaire qui deviendra le purgatoire et donc sur l’efficacité de la prière pour les morts(6) : il y a peut-être, selon lui, un feu infernal transitoire où l’on conserverait l’espoir du Salut. Le développement des messes pour les morts, surtout à partir de l’an mille, rend nécessaire l’affirmation de leur utilité, tant par une élaboration dogmatique encore bien sommaire de leur effet sur le sort des âmes que par des histoires de revenants qui demandent des prières(7) ou encore par les récits fantastiques de visites dans l’au-delà. L’apparition tardive d’équivalences précises entre les prières pour les morts et les années de souffrances qu’elles leur épargnent n’est certainement pas un effet du développement des comptabilités commerciales(8), puisque les pénitentiels instauraient une culture comptable des péchés à un moment où l’essentiel du négoce se réduisait au troc. En revanche, la disparition des pénitentiels au cours du XIe siècle et les transformations de la confession, progressivement centrée sur l’aveu, pourraient y être pour quelque chose. L’Église ne prescrit plus ce qu’il faut faire pour aller au ciel : elle quantifie la durée des peines purgatoires remises, sans se prononcer sur celles qu’il peut rester à effectuer.

Il est courant de prêter au Moyen ge dans son ensemble une préoccupation anxieuse des fins dernières, qu’il s’agisse de la fin des temps ou du sort de l’âme après la mort.



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