Noirs complots by Collectif

Noirs complots by Collectif

Auteur:Collectif [Collectif]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Science-Fiction
Éditeur: Les Belles Lettres
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00


— Ils ont failli te prendre ?

Sylvie posait des questions. Le sourire effronté de Pétrus n’y pouvait pas grand-chose. La jeune femme sentait tout.

Elle tira son visage contre le sien, le fixa droit dans les yeux. Le genou de Sylvie glissa lentement entre les cuisses de Pétrus. De son épaule, sa main descendit vers ses doigts, qu’elle mordilla doucement, en commençant par le majeur. Elle cherchait autre chose, une invention plus intime. Elle leva la jambe gauche et bascula sur lui, les genoux serrés le long de son torse.

Le soir où Sylvie était arrivée à Bastia, Pétrus, retenu à Paris, avait eu très peur. Il revoyait les pelotons de CRS à la gare de Lyon, casqués, arme au pied. La Sûreté nationale était dépassée, la gendarmerie mobile ne bougerait pas, mais le ministre de l’intérieur était un acharné. Le gouvernement avait fait voter une loi d’urgence qui renforçait ses pouvoirs sur la presse et sur les citoyens. Une fois les menottes aux mains, il n’y avait plus moyen de s’en sortir. Sous la charpente d’acier de la gare, Pétrus aurait voulu savoir de qui se méfier. Le hall était encombré d’une foule inquiétante. Il y avait des soldats braillards, des vendeurs de journaux interdits, des clochards roulés dans le pinard. Et une cohue indescriptible de casques, de calots, de képis qui débordait jusque sur les quais, emplissant les wagons à l’arrêt.

Le matin, Pétrus avait eu un rendez-vous au Trianon Palace, à Versailles. Le commandant Vitasse était venu dans l’accoutrement incroyable d’un ecclésiastique en soutane. Il avait poussé la coquetterie jusqu’à glisser un gros bréviaire en cuir noir sous son bras. Dans le hall dallé de marbre noir et blanc, les deux hommes avaient reconnu un écrivain célèbre devenu un des plus fermes soutiens de l’Hombre. Il avait un long coup d’oiseau déplumé, une étrange manière de cligner de l’œil, baissant lourdement les paupières par moment. Il occupait une suite au deuxième étage, où il aimait s’enfermer pour écrire ses romans.

Mais depuis quelques mois, il songeait à autre chose.

— L’heure n’est plus à la littérature, elle est à l’Histoire ! lui avait effrontément asséné un jeune journaliste.

— L’histoire d’une grande nation n’est-elle pas un grand roman ? avait répondu le vieil écrivain de sa voix caverneuse.

Ce témoin des passions bouillies dans l’eau bénite d’un christianisme de notables aimait se faire une conscience. En l’apercevant, le commandant Vitasse s’était dit qu’il valait mieux qu’il ignorât ce qui était vraiment en train de se passer.

Le printemps était doux, Pétrus et Vitasse étaient allés se promener dans le parc. Ils avaient marché jusqu’au hameau de Marie-Antoinette, parlant toujours à voix basse. Pétrus se revoyait, baissant la tête, pour laisser croire à ceux qu’ils croisaient sous les grands arbres qu’il était en train de se confesser.

Au passage de vieilles dames qui leurs jetaient des regards curieux, Vitasse s’était pris au jeu. Il avait levé le bras.

— Ego te absolvo, in nomine Patri et Filio…

Les nouvelles étaient mauvaises. Le chef du corps du régiment d’infanterie coloniale de Satory semblait hésitant.



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