Moi, Tituba, sorcière… Noire de Salem by Condé Maryse

Moi, Tituba, sorcière… Noire de Salem by Condé Maryse

Auteur:Condé Maryse
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Mercure de France
Publié: 2017-05-14T16:00:00+00:00


Pareils à trois grands oiseaux de proie, les hommes pénétrèrent dans ma chambre. Ils avaient enfilé des cagoules de couleur noire, percées seulement de trous pour les yeux et la buée de leurs bouches traversait le tissu. Ils firent rapidement le tour de mon lit. Deux se saisirent de mes bras pendant que le troisième ligotait mes jambes, si serré que je criai de douleur. Puis l’un d’entre eux parla et je reconnus la voix de Samuel Parris :

— Qu’au moins quelque chose de bon sorte de l’Enfer que tu as déchaîné. Il nous serait facile de t’abattre. Personne dans ce village ne lèverait le petit doigt et les magistrats de Boston ont d’autres chats à fouetter. C’est d’ailleurs ce que nous ferons si tu ne nous obéis pas. Car, Tituba, tu ne mérites pas la corde pour te pendre !

Je balbutiai :

— Que voulez-vous de moi ?

L’un d’eux s’assit sur le bord de mon lit et se penchant sur moi à me toucher, martela :

— Quand tu paraîtras devant le Tribunal, confesse que cela est ton œuvre.

Je hurlai :

— Jamais ! Jamais !

Le coup m’atteignit en travers de la bouche et elle pissa le sang.

— Confesse que cela est ton œuvre, mais que tu n’as pas agi seule et dénonce tes complices ! Good et Osborne, puis les autres !

— Je n’ai pas de complice puisque je n’ai rien fait !

L’un des hommes se mit carrément à cheval sur moi et commença de me marteler le visage de ses poings, durs comme pierres. Un autre releva ma jupe et enfonça un bâton taillé en pointe dans la partie la plus sensible de mon corps en raillant :

— Prends, prends, c’est la bite de John Indien !

Quand je ne fus plus qu’un tas de souffrances, ils s’arrêtèrent et l’un des trois reprit la parole :

— Tu n’es pas la seule créature de l’Antéchrist dans Salem. Il y en a d’autres dont tu vas donner les noms devant les juges. Écoute !

Je commençai à comprendre où ils voulaient en venir. Je fis d’une voix mourante :

— Vos enfants n’ont-elles pas nommé mes soi-disant complices ? Que voulez-vous que j’ajoute à leurs propos ?

Ils rirent :

— Ce sont, comme tu le dis, propos d’enfants, fort incomplets ! Bientôt nous leur apprendrons à ne pas omettre l’essentiel ! Et c’est toi qui ouvriras le chapitre !

Je secouai la tête :

— Jamais ! Jamais !

Alors, de nouveau, ils s’acharnèrent sur moi et il me sembla que le bâton taillé me remontait jusqu’à la gorge. Néanmoins, je tins bon et râlai :

— Jamais ! Jamais !

Ils se concertèrent, puis la porte grinça et une voix appela doucement :

— Tituba !

C’était John Indien. Les trois oiseaux de proie le poussèrent en avant :

— Explique-lui, toi qui parais moins borné !

Ils se retirèrent et il ne demeura dans la pièce que notre douleur et l’odeur de môn humiliation !

John Indien me prit contre lui et quelle douceur c’était de retrouver l’abri de ses bras ! Avec son mouchoir, il s’efforça d’éponger le sang de mes plaies.



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