Lise hier by Caroline Chartrand

Lise hier by Caroline Chartrand

Auteur:Caroline Chartrand
La langue: fra
Format: epub
Tags: Roman
ISBN: 9782764427798
Éditeur: Québec Amérique
Publié: 2014-09-23T00:00:00+00:00


CHAPITRE VINGT ET UNIÈME

« Vous avez prénom que je voudrais pour mon amant. »

Un gai printemps s’installe pour de bon sur l’île. Dans le lilas blanc, un cardinal chante, une beauté sans nom. Chez le saucissier voisin, les jeunes femmes choisissent des gendarmes. Devant Lise, il n’y a rien (de spécial), et le ciel est bleu de partout.

Sur la terrasse de ce café du marché Jeanne-Talonne, sous les rayons encore obliques du soleil, chez les humains, on lézarde. Les uns grillent, les autres dorent ou bien se gratinent. Glandeurs de tout acabit se gorgent, grâce à leur peau de plus en plus dénudée – à vents couverts, on peut même oser la manche courte –, de vitamine D.

Sous un parasol de cils recourbés, du coin de l’œil et de toute son âme, mais sans se l’avouer, Lise est romantique et aux aguets. Son radar tourne et ses antennes sont dressées. Elle scrute les parages à la recherche d’un homme qui lui ferait bien quelques sparages. Où sont ceux qui détonnent? Où est son détonateur? Où est son catalogue analogue, son catalyseur, un qui serait son teddy bear? Elle est là, Lise, parmi les milliards sous le firmament. Ne la voyez-vous pas? Elle est là, Lise, sur son starting-block, muscles bandés, cul bien haut dans les airs, prête à filer avec vous. Délectables messieurs, gentils gentlemen, ne voyez-vous pas tous les fanions qu’elle agite, la belle immobile? Lise est un fruit mûr, savoureux et juteux n’attendant qu’à être cueilli et croqué, venez! Oh! et qu’écrire de ce trou, de cette gorge affamée à l’appétit d’ogresse qui implore entre ses cuisses et qui aspirerait avidement une belle grosse queue? « Venez cogner à mes pupilles! Venez me taper dans l’œil! Peut-être vous ouvrirai-je et que vous y tomberez? Allez, venez, venez! Venez, exaucez-moi! »

Pour l’instant, le seul homme près de l’infortunée est son voisin de table, un troll démesuré qui pérore des platitudes crasses d’une insipidité creuse, d’un air satisfait et d’un ton affirmé. Ses inanités, ses inepties nées de réflexions écourtées, il les rote, s’en gargarise fort. Dégoûtant. La femme qui l’accompagne n’a dit mot depuis des minutes. « Sauve-toi, sauve-toi. Lève-toi et file, fille! Veux-tu vraiment rentrer au bras de cette truite? » Voilà un des bonheurs d’être seule, s’il en est un : ne pas avoir à supporter de cave, jamais.

Passent sept abeilles qui jouent à saute-mouton.

De temps en temps, Lise parle avec les oiseaux. Elle ne dirait pas qu’ils conversent, mais plutôt qu’ils convergent. La rencontre se déroule ainsi. D’abord, ils se font face, se regardent puis se saluent en penchant la tête vers une épaule – ou une aile – puis vers l’autre, de droite à gauche, par deux fois : c’est le signe secret9. Puis, selon la température, mais surtout selon leur humeur, ils mêlent le son de leurs voix, l’un à la suite de l’autre ou en duo.

Aujourd’hui à la terrasse, un merle qui n’a pas perdu son bec s’amuse avec Lise. De pépiements en



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