L’île des disparus by Camilla && Viveca Sten

L’île des disparus by Camilla && Viveca Sten

Auteur:Camilla && Viveca Sten
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Michel Lafon
Publié: 2018-06-15T00:00:00+00:00


32

La brume verte flotte doucement.

Sous l’eau, tout est incroyablement calme, par rapport à la tempête qui fait rage en surface. Exceptionnellement, je ne suis pas effrayée mais déterminée, et ce sentiment repousse tout le reste.

La mer est à moi. Toi, tu n’as pas ta place ici.

Le fond s’étend sous mes pieds, mais il se passe quelque chose d’étrange : au lieu d’être tapissé de vert, il est gris et en décomposition. Je ne vois aucune végétation, ni algue, ni plante aquatique, juste de la boue, exactement comme dans le reportage qu’on nous a montré à l’école.

Soudain, je me sens seule et abandonnée. Ce n’est pas normal, je le sais : je devrais avoir des amis, une famille, des gens qui se réuniraient autour de moi. Ensemble, on aurait été forts. Où sont-ils donc tous passés ?

Du coin de l’œil, je perçois un mouvement. Quelque chose serpente dans mon dos, à la fois assez loin et trop près de moi. Un immense danger. Tout me dit de fuir, mais mon instinct prend le dessus.

J’ouvre la bouche, emplis mes poumons d’eau et hurle avec une force dont je ne me savais pas capable.

Ma voix brise la mer comme du verre. Une cascade de sons s’échappe de ma gorge dans toutes les directions. L’eau frémit, bouillonne, et cette fois j’en suis la cause. La tête rejetée en arrière, je crie et chante à pleine voix, propulsant des ondes sonores qui secouent, soulèvent et tourmentent la mer.

J’entends un claquement, puis la plainte misérable, étranglée d’une créature blessée en fuite. À travers la brume verte devenue plus obscure, je vois une ombre se recroqueviller puis disparaître.

Alors que je me sens plus forte que je ne l’ai jamais été, je suis prise d’un vertige. Comme dans mes rêves, mes poumons s’embrasent, ma poitrine se déchire et je ne sens plus mes membres.

Je ne flotte plus, je coule.

Tu ne peux pas respirer sous l’eau, me dit une voix intérieure d’un ton désolé. Tu n’as plus de branchies.

Mon champ de vision se réduit.

Lorsque les humains tentent de respirer sous l’eau, ils perdent la vie.

Puis vient le noir.



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