Les origines de la solution finale by Browning Christopher R

Auteur:Browning, Christopher R. [Browning, Christopher R.]
La langue: fra
Format: epub
Tags: 2ème guerre mondiale, Documents et essais, Histoire
ISBN: 9782251380865
Publié: 2016-07-30T16:00:00+00:00

La « solution finale » à l’Est

Les différences chronologiques et régionales qui apparaissent dans les rapports des Einsatzgruppen, de la Wehrmacht et des unités de police confortent l’idée selon laquelle la planification centrale et le processus de décision au plus haut niveau sont un facteur parmi beaucoup d’autres qui ont contribué à la radicalisation de la politique antijuive au cours des six premiers mois de l’opération Barbarossa. Ce sont les officiers sur le terrain qui décident si une communauté est temporairement épargnée, décapitée en tuant les membres de l’« intelligentsia » ou complètement liquidée. Leurs supérieurs sanctionnent de diverses façons ce genre d’initiatives prises à un niveau inférieur. Les huiles de la Wehrmacht préfèrent des ordres ayant un effet rétroactif qui, en étant fondés sur des « directives Barbarossa » élaborées avant l’invasion, donnent l’impression que les mesures antijuives font partie intégrante de la sécurisation du territoire occupé. Himmler, la direction de la SS et de la police qui ne se fient pas uniquement aux voies de communication inefficaces et aux rapports qu’ils reçoivent, rencontrent leurs hommes à l’Est pour de brèves séances de travail afin d’approuver et encourager les actions énergiques et pour les couvrir face aux critiques occasionnelles d’organismes rivaux, principalement de l’administration civile. L’Ostministerium de Rosenberg essaye de s’adapter à la situation qu’il trouve lorsqu’il prend ses fonctions et, à la fin de l’année, il favorise les mesures coordonnées qui intègrent l’appareil de police plutôt que celles qui y génèrent de l’hostilité.

Quel est le moteur du processus de tueries dans la phase initiale de la guerre contre l’Union soviétique ? Il est clair que les facteurs économiques jouent un rôle. Déjà dans sa phase de planification, l’opération Barbarossa est conçue comme une guerre pour assurer la suprématie allemande en Europe et donc sa nature fondamentale implique une redistribution massive de la richesse aux dépens du bien-être matériel et physique de la population du territoire occupé. Lorsque la campagne démarre, la politique allemande effective est de moins en moins influencée par les plans d’avant l’invasion et de plus en plus par la dynamique des événements qui, même s’ils sont provoqués par des organismes allemands, menacent souvent d’échapper à leur contrôle. Dès la fin juillet, les experts économiques de l’armée se sentent mis sous pression afin qu’ils abandonnent les projets à long terme pour résoudre des problèmes urgents à court terme – nourrir les troupes à l’Est et combler le déficit d’approvisionnement pour le front intérieur [276] . Cette instance sur des questions pratiques fondamentales n’offre pas vraiment à la population de meilleures perspectives en matière de moyens de subsistance que les plans initiaux [277] , elle permet néanmoins de faire basculer l’équilibre du pouvoir politique du centre vers la périphérie, où les autorités régionales et locales sont supposées prendre des décisions fondées sur les conditions du moment [278] .

Avec l’extension de la ligne de front à l’Est, d’autres zones peu ou pas industrialisées passent sous contrôle allemand. Étant donné qu’on a besoin de moins de travailleurs pour des

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