Les Bonnes Personnes by Véronique Papineau

Auteur:Véronique Papineau
La langue: fra
Format: epub
ISBN: EPUB9782764641811-43768
Éditeur: Editions du Boréal

L’obstination

Cela faisait quatre mois que Lecoq et Charlotte formaient un couple et un mois qu’ils ne faisaient plus l’amour toutes les fois qu’ils se voyaient en dehors du cégep.

Charlotte essayait de se convaincre que l’approche de la fin de la session, la mise en œuvre de la nouvelle convention collective et le rattrapage en accéléré des heures de classe perdues durant la grève avaient tout à voir avec cette « situation », et qu’elle et son corps imparfait n’y étaient pour rien. Laure prétendait que les couples en arrivaient toujours là à un moment ou à un autre. « Après quatre mois ? » s’était étonnée Charlotte. La lune de miel avait été si brève qu’elle regrettait de ne pas avoir pris de notes afin de s’en remémorer les bons moments.

Lecoq travaillait beaucoup et l’augmentation de son niveau de stress aurait pu se mesurer sur une échelle s’il en avait existé une. Il arrivait toujours à l’école avant elle. Lorsqu’elle passait à son bureau pour l’inviter à dîner, il refusait et avalait à la place un sandwich devant son ordinateur. Si, le soir, il venait la rejoindre chez elle au lieu de rentrer chez lui, c’était toujours après dix-neuf heures. Charlotte aurait pu avoir une patère en guise d’amoureux que ses soirées ne se seraient pas passées autrement. Lecoq n’avait d’autre envie que de regarder la télévision avec son bras autour de ses épaules. Il était pompette après deux verres de vin et, la plupart du temps, il cognait des clous sur le canapé avant de filer au lit, sans même se brosser les dents. Sa compagnie était aussi gaie qu’un long métrage de Lars von Trier.

Un soir, il lui avait annoncé qu’il leur faudrait annuler leur voyage au Brésil parce qu’il avait accepté de donner un cours d’été. Non seulement il la mettait devant le fait accompli — son contrat étant déjà signé —, mais il avait ajouté l’insulte à l’injure en essayant de lui vendre l’idée que deux ou trois week-ends en camping leur seraient tout aussi bénéfiques. Charlotte en avait été sidérée. Elle lui avait demandé si c’était une blague. Lecoq s’était énervé. Il prétendait avoir besoin de cet argent, elle ne pouvait pas lui reprocher de saisir cette occasion. Ça ne lui plaisait pas non plus de devoir s’échiner tout l’été à intéresser aux peintres de la Renaissance des élèves qui auraient également préféré être ailleurs, mais c’était ainsi.

Ils avaient discuté quelques minutes avant que le ton ne monte et que Charlotte ne s’écrie : « C’est aussi mon été que tu fais foirer ! » Lecoq avait respiré profondément pour se calmer. Il avait commencé : « Ma poule… » Mais elle l’avait coupé : « Il pleut toujours en camping, on dort les fesses dans l’eau, on gèle la nuit et on crève de chaleur aussitôt que le soleil se lève. J’haïs le camping ! Tu n’avais pas le droit de me faire ça, maudit égoïste ! »

Lecoq n’avait pas passé la nuit chez elle.

Télécharger

Déni de responsabilité:
Ce site ne stocke aucun fichier sur son serveur. Nous ne faisons qu'indexer et lier au contenu fourni par d'autres sites. Veuillez contacter les fournisseurs de contenu pour supprimer le contenu des droits d'auteur, le cas échéant, et nous envoyer un courrier électronique. Nous supprimerons immédiatement les liens ou contenus pertinents.