Les amours d'une empoisonneuse by Emile Gaboriau

Les amours d'une empoisonneuse by Emile Gaboriau

Auteur:Emile Gaboriau [Gaboriau, Emile]
La langue: fra
Format: epub
Publié: 2011-12-20T16:00:00+00:00


VIII

PREMIERS MALHEURS

Le lendemain de ce jour eut bien d'autres lendemains encore. Les deux amants prirent l'habitude de ces douces causeries de chaque soir.

Jamais plus chaste amour ne ravit deux cœurs plus dignes l'un de l'autre.

Olivier voulut se faire pardonner son audace. Peu à peu, sans réticences, sans détour, Olivier raconta son histoire à Henriette.

—Hélas! mon amie, je suis indigne de vous.

—Non, répondait la jeune fille, puisque mon cœur vous a choisi.

—Votre père consentira-t-il jamais à notre union?

—Pourquoi non? Qu'était-il avant d'être riche?

—C'est vrai, ma douce Henriette; mais malgré mon peu d'expérience du monde, je sais fort bien que ceux qui sont arrivés n'aiment pas à se rappeler d'où ils sont partis.

—Mon père n'est pas ainsi.

—Dieu le veuille!

—Et, d'ailleurs, n'avez-vous plus de courage? Conquérir une position, est-ce donc si difficile, lorsque celle que l'on aime doit en être le prix? et vous m'aimez, n'est-il pas vrai, mon ami?

—Oh! mille fois plus que je ne saurais vous le dire, que vous ne sauriez l'imaginer.

Et, pour la centième fois, Olivier reprenait le triste récit de ses tortures avant le jour où, pour la première fois, sa main avait touché celle de son Henriette.

Il avait alors repris ses travaux avec plus d'acharnement que jamais, et avec un tel succès que le conseiller lui-même lui avait annoncé qu'il allait s'occuper de faire les démarches nécessaires pour lui obtenir une place, premier acheminement vers une grande position.

Plus que jamais l'espérance dorait le ciel des deux amants, lorsqu'un soir, en arrivant au rendez-vous, Olivier y trouva Henriette. Il avait cependant devancé l'heure.

—Nous sommes perdus, lui dit-elle en fondant en larmes.

—Qu'y a-t-il, grand Dieu?

—Mon père a trouvé un parti pour moi,... à ce qu'il dit...

—Il veut vous marier?

—Il le veut, et avant la fin de ce mois.

—Et avez-vous pu consentir, vous, Henriette?

—O Olivier! pouvez-vous être injuste et ingrat à ce point; pouvez-vous ainsi méconnaître votre amie? J'ai tout fait, hélas! j'ai pleuré, j'ai supplié, je me suis traînée aux pieds de mon père...

—Il a pu résister à vos larmes?

—J'ai été jusqu'à lui dire que j'en aimais un autre:—«Eh! que m'importe!» m'a-t-il répondu.

—Oh! malédiction! s'écria Olivier; Henriette, le nom de cet homme que l'on vous destine? son nom! son nom!...

—Mon ami, votre colère m'épouvante; ce nom, je ne vous le dirai pas. Mais, croyez-moi, ne m'accusez pas, j'ai résisté, je résisterai encore; dût-on me traîner à l'autel, on ne m'arrachera jamais le: Oui! fatal qui doit m'enchaîner à un autre.

—Oh! merci, mille fois merci! mais que devenir, que devenir?...

—Je ne suis qu'une femme, Olivier, c'est à vous de voir, d'aviser. Quoi que vous décidiez, je vous obéirai sans hésitation, dussé-je être perdue après. Doutez-vous encore de mon amour? Mais adieu, mon absence pourrait être remarquée; adieu... et à demain....

Et elle s'éloigna, laissant Olivier foudroyé.

—Voir, aviser, se disait-il, quel parti prendre? Aviser à quoi? Que puis-je, moi, faible, isolé, sans amis?...

Dans ces perplexités, il résolut de consulter Cosimo. Après lui avoir fait jurer un secret absolu, il lui raconta l'histoire de ses amours.

Le vieux domestique sourit; depuis très longtemps il savait aussi bien que son jeune maître ce grand secret que lui arrachait la douleur.



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