Les amoureux by Chapsal Madeleine

Les amoureux by Chapsal Madeleine

Auteur:Chapsal,Madeleine [Chapsal,Madeleine]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Littérature française
ISBN: 2213598053
Éditeur: Fayard
Publié: 1997-02-04T23:00:00+00:00


29

La plage est si longue qu’on peut y marcher des kilomètres tout en voyant loin en avant qui vient à sa rencontre.

Des chevaux, tôt matin, qui font quelques enjambées dans les vagues avec leurs jeunes cavaliers légèrement effrayés.

Des joggeurs, bien sûr, concentrés sur leur foulée, ahanants, suants et trébuchants, dans un effort presque aussi pénible à voir que celui de malades à leur dernier souffle.

Des promeneurs aussi, comme Marianne. Un pan de jupe coincé dans sa ceinture afin de pouvoir marcher dans la première vague, elle baguenaude, se baissant pour ramasser un coquillage, remettre à l’eau un crabe encore gigotant, examiner telle corolle, telle algue aux formes étranges en provenance de Tailleurs sous-marin.

Il fait beau à l’heure du lever du soleil, une brume adoucit les phares, les côtes lointaines ; même le bruit incessant du ressac paraît apaisé.

Elle ne l’a pas vu venir…

Il faut dire qu’elle ne regardait pas du côté des dunes et qu’avec le bruit de la mer, on n’entend pas marcher dans le sable. Dévalant le chemin balisé – comme au temps de la guerre, les dunes sont à nouveau protégées des promeneurs inconscients par des kilomètres de barbelés –, il l’a rattrapée par-derrière.

— Vous voici bien matinale !

Elle s’est retournée d’un bloc. Herrand se tient devant elle, en pantalon de toile, mains libres, cheveux au vent.

— Et vous ? Vous n’êtes pas au travail ?

— Si, là-haut. Quand je vous ai aperçue, j’ai dégringolé jusqu’à vous… Heureusement, vous n’allez pas trop vite ! J’ai horreur des joggeurs, ils traversent n’importe quel cadre sans même savoir où ils sont ! Des termites, en quelque sorte…

— Et que peignez-vous, si tôt ?

— Rien, la mer. Je ne vais pas me donner le ridicule de vous faire un discours sur les flots si merveilleusement changeants au fil des heures… Je voulais vérifier quelque chose…

— Un rouge ?

— Presque : une teinte de mauve.

— Et vous la teniez ?

— Sauf que ce n’est pas la mer qui est mauve, c’est l’herbe !

— Je la vois grise.

— Montez, vous changerez d’avis !

— Monter où ?

— Là où je suis installé. J’ai choisi le meilleur endroit, une combe ; je n’y ai rencontré que deux lapineaux… Par une trouée dans la végétation, j’aperçois la mer, un bout de plage… C’est ainsi que je vous ai vue passer. Heureusement que j’ai levé l’œil juste à ce moment-là, ce fut rapide comme un plan de cinéma…

— Et vous m’avez reconnue ?

— Vous bougez comme personne. Je ne vous l’ai pas dit ?

— Fabrice, pourquoi me draguez-vous ?

— C’est inconscient. Vous devez me plaire…

— Je suis amoureuse, je vous l’ai signalé.

— C’est exact ! Tenez, je l’aperçois là-bas, votre amant, tout au bout, regardez bien : il est en train de faire du jogging…

Malgré elle, Marianne se tourne dans la direction indiquée.

— Allez, il se passe parfaitement de vous et de moi, laissons-le à ses plaisirs, et venez partager les miens !… Je vous jure qu’ils sont innocents…

Il la prend par la main afin de l’aider à escalader le bout de chemin empierré.



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