L'enfant roi de Navarre by Peyramaure Michel

Auteur:Peyramaure, Michel [Peyramaure, Michel]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Historique
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00

Elle réunit les états de Navarre, décréta une amnistie générale pour les séditieux mais fit pendre trois de leurs chefs.

— Je suis décidée à me montrer impitoyable ! dit-elle. Dans les affaires de religion, j’irai jusqu’au bout. J’ai la guerre dans les entrailles…

Elle lui annonça qu’ils allaient devoir quitter le château de Pau.

— Pour revenir à la cour de France ?

Elle s’esclaffa. Retomber dans les griffes de la Florentine ? Certes non !

— Nous allons rassembler toutes les forces dont nous disposons et prendre la route de la Saintonge. On nous attend là-bas.

Les massacres avaient repris dans le Midi avec une fureur accrue. Aux atrocités de Monltuc les huguenots avaient répliqué par la Michelade : le jour de la Saint-Michel, à Nîmes, les réformés jetèrent dans un puits les cadavres de quatre-vingts catholiques égorgés dans une crypte.

Première halte sur la route de La Rochelle : Bordeaux. Le prince de Navarre, qui manquait d’argent, investit quelques notables et en obtint ; il séduisit les dames qui lui trouvaient le « poil un peu ardent » et le nez un peu long, mais l’allure d’un dieu Mars, sans qu’il y perdît sa virginité.

L’avenir était sombre pour la reine-mère. À l’ouest, les huguenots prenaient position en Saintonge ; à l’est, les Espagnols souhaitaient traverser le territoire français pour aller combattre la révolte des gueux des Pays-Bas ; au sud, quarante mille bandouliers attendaient l’ordre de fondre sur la Navarre.

Elle cloua le bec aux huguenots en nommant Anjou (son « cher cœur », son « petit aigle ») lieutenant général ; elle interdit au duc d’Albe le passage par la France ; quant à l’invasion par le sud, elle la tenait pour un chantage, Philippe ayant assez à faire dans le Nord.

Philippe Strozzi prit Melchior par le bras et l’entraîna au fond de la tente où il venait de tenir un conseil.

— Mon garçon, dit-il, il va falloir renoncer à ton bel uniforme de garde-française. Le roi a décidé, pour apaiser les esprits, de dissoudre cette unité jugée trop catholique. Ta carrière aura été brève. Trois roulements de tambour, une montre, et te voilà dehors. Miseria…

Miseria… C’est le mot qui convenait à la situation. Melchior s’était ruiné dans l’achat d’un cheval hongrois, d’une tenue militaire, et avait loué les services d’un écuyer.

— Est-ce à dire, bredouilla-t-il, que je doive m’apprêter à aller planter mes choux à Lagos ?

— Certes, non ! Je te tiens, je te garde. Tu es le seul de mes officiers à pouvoir me réciter Plutarque et Virgile, et de plus tu ne manques pas d’initiative et de courage. Tu ne feras que changer d’uniforme. Tu vas participer à une campagne en Picardie afin de veiller à ce que les troupes du duc d’Albe ne viennent pas piétiner nos plates-bandes. Une véritable promenade militaire…

Lorsque Melchior annonça son prochain départ à Margret, elle se jeta à son cou en s’écriant :

— Refuse de partir ! Quelque chose me dit que tu ne reviendras pas.

Elle était trop émotive. Il tenta de la rassurer : ce n’était pas à la guerre qu’on l’envoyait.

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