L'embellie by Micheline Bail

L'embellie by Micheline Bail

Auteur:Micheline Bail [Bail, Micheline]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Roman Historique, Littérature québécoise
Éditeur: Editions Hurtubise
Publié: 2011-09-02T02:53:14+00:00


Le conseil souverain était au grand complet, en ce lundi 29 novembre de l’an de grâce 1694. Outre le procureur général François Ruette d’Auteuil, il y avait là le premier conseiller Louis Rouer de Villeray, les autres conseillers Mathieu Damour, Nicolas Dupont de Neuville, Jean-Baptiste de Peiras, Charles Denys de Vitray, et l’intendant Bochard de Champigny. L’huissier et le greffier étaient également présents. Comme ils avaient appris que le comte de Frontenac avait l’intention d’assister à cette séance, deux membres du conseil étaient allés à sa rencontre pour l’escorter jusqu’à son siège, selon le rituel négocié six ans plus tôt.

Louis pénétra dans la pièce, le port altier et la tête haute. Il portait ses habits des grands jours, sa meilleure perruque, et il s’était tellement inondé de parfum que cela prenait aux narines et empestait. Il salua brièvement la compagnie tout en se dirigeant vers son fauteuil, situé à gauche de celui de l’intendant. Les membres du conseil étaient assis autour d’une longue table encombrée de piles de documents épars et ils devisaient à voix basse. L’arrivée du comte jeta un froid. Un silence embarrassé se fit aussitôt. La place de l’évêque était vacante, car le prélat avait déjà quitté le pays, au grand soulagement d’une foule de gens qu’il s’était inutilement mis à dos et qui saluaient son départ avec bonheur.

Louis présenta au greffier la requête de Mareuil, qui contenait pas moins de huit pages bien tassées, rédigées d’une grosse écriture brouillonne. Le sieur Roger se leva et se mit à la lire, d’une voix monocorde.

L’officier de Frontenac reprenait les principaux éléments de la cause qui l’avait mené en prison, identifiait l’accusation de lèse-majesté divine qui pesait sur lui, remettait en question la neutralité du commissaire Villeray, rappelait le refus de l’évêque de lui donner copie du mandement et toutes ses requêtes laissées sans réponse, de même que la collusion existant entre l’évêque et les commissaires pour faire disparaître les éléments les plus importants de sa déposition. Il récusait en outre la compétence de l’évêque à poursuivre pour ces sortes de crimes devant un tribunal civil et, dénonçant les moyens utilisés, il affirmait qu’on avait induit et sollicité des gens à déposer contre lui sous la peur d’être châtiés et chassés hors de la ville, qu’on l’avait emprisonné et intimidé par la menace, et qu’on l’avait accusé injustement de s’être introduit de nuit chez monseigneur l’évêque en fracturant sa fenêtre. En vertu de quoi, il interjetait appel en cassation des arrêts du conseil souverain et demandait qu’on porte sa cause devant le Conseil d’État du roi. Il terminait en demandant au gouverneur général, le seul représentant direct du roi en ce pays, de le faire élargir sur-le-champ en attendant que sa cause soit entendue par ce deuxième tribunal.

Une fois cette lecture terminée, Louis se leva avec lenteur, posa les mains sur la table devant lui en écartant les doigts, dirigea son regard au loin, se gourma et commença son réquisitoire par ces paroles:

— Messieurs… les affaires du sieur de



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