Le Vol du serpent by Michel Jeury

Le Vol du serpent by Michel Jeury

Auteur:Michel Jeury
La langue: fra
Format: epub
Tags: Science-Fiction
Éditeur: Milady
Publié: 2016-08-25T16:00:00+00:00


Chapitre 16

Rob sortit en trébuchant, dans une brume si épaisse qu’il voyait à peine Isa, à un mètre devant lui. Assommé par un immense effort d’attention, mais moins désespéré qu’il l’avait été à un certain moment. Et nanti d’au moins trois certitudes…

La première : le général Yao Wang savait la vérité sur les Terres parallèles et les brèches, peut-être même sur les projets de Luruak. Il préférait cependant la version religieuse inventée par le dedjaz. De son point de vue, il avait peut-être raison. La lutte contre le communisme et l’Union soviétique l’obsédait plus que tout. Et le complot qui l’associait peut-être à Luruak devait viser à débarrasser la Chine d’un Premier ministre, Liu Qing Wei, trop mou et neutraliste…

Dimitri Donskoï, lui, semblait troublé, déchiré. Peu après la défaite de la Fédération slave et la mort de Beloozero, il avait repris du service chez les vainqueurs, peut-être pour échapper à une lourde condamnation ou aux travaux forcés dans les grands chantiers sahariens. Peut-être méditait-il une vengeance à très long terme. D’une façon ou d’une autre, il avait gagné la confiance de Luruak qui avait besoin d’un Blanc pour le représenter chez les racistes sud-africains. Il était sur la Terre de Suva. Et là, il avait découvert un formidable Empire slave qui s’appelait Union soviétique et avait entrepris la conquête du monde. Comment n’aurait-il pas été de cœur avec ses frères russes ? Comment n’aurait-il pas été tenté de trahir celui qui voulait détruire l’Union soviétique en provoquant une guerre atomique ? Et Rob avait choisi de le pousser de toutes ses forces vers cette tentation.

Mme Chuan avait-elle perçu ses manœuvres ? Aucun doute maintenant : elle appartenait à la Maintenance. Elle savait que Rob et Isa étaient des transfuges, des voateurs sauvages. Elle essaierait donc de leur appliquer le traitement que la Maintenance réservait à ceux « qui en savaient trop » : l’effacement de mémoire, beaucoup plus efficace que le lavage de cerveau envisagé par le général Yao Wang : Que faire ? Reprendre contact avec elle en jouant cartes sur table ? C’était une possibilité.

Et il fallait appeler le tegalog Wallak pour un complément d’instructions. Wallak pouvait seul décider – en fonction de sa position secrète – de l’attitude de ses envoyés en face de la Maintenance.

Dans la brume, Rob vit soudain une silhouette se dresser devant lui, au milieu du couloir. Donskoï ? L’homme était translucide et il le reconnut pour ainsi dire de l’intérieur. « Il veut me parler, mais il hésite. Impossible ici. Peut-être a-t-il envie de convenir d’une rencontre ultérieure ? » Donskoï avait la tête et le cœur pleins de ses doutes et de ses déchirements.

Rob sentit qu’il pouvait briser d’un seul coup la résistance que le Rurik opposait à la formidable tentation du retournement. Il émit un message simple : « Rejoindre l’Union soviétique le plus vite possible… » Il l’appuya d’une énorme charge de désir et de fureur. Espoir, vengeance… Donskoï acquiesça intérieurement… Son camp n’était pas celui des envahisseurs assaraws, ces nègres que le colonel Beloozero appelait « singes ».



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