Le soleil noir by Armèle Malavallon

Auteur:Armèle Malavallon [Malavallon, Armèle]
La langue: fra
Format: epub
Tags: 2016-01-11T20:45:58.666000+01:00
Éditeur: Les Nouveaux Auteurs
Publié: 2015-02-09T23:00:00+00:00

Chapitre 19

L’atmosphère de la pièce est devenue glaciale. Un silence s’abat sur les épaules des policiers qui échangent des regards médusés.

Domingo s’est arrêté de taper, mains suspendues au-dessus du clavier, Brumel cherche le regard de Peyot en se balançant d’un pied sur l’autre tandis que le commandant fixe avec stupeur la veuve aux yeux d’acier.

Cette dernière évite le contact visuel. Elle semble s’être réfugiée dans une bulle hermétique à l’intérieur de laquelle la phrase qu’elle vient de prononcer est sensée, voire justifiée. Le menton relevé comme par défi, elle regarde droit devant elle.

Peyot finit par rompre le silence.

— Madame, je ne connais pas votre histoire familiale et j’imagine que vous avez des raisons pour vous exprimer de la sorte. Néanmoins, il est apparu au cours de l’enquête que votre belle-fille et son décès prématuré pourraient avoir un lien avec la mort de votre mari.

Agacée, Christine Dormeux grommelle puis finit par rétablir le contact visuel avec Peyot, plantant son regard buté dans celui du commandant.

Elle lâche avec le ton d’une institutrice adepte du coup de règle :

— Voyez-vous ça !

Domingo tressaille. De plus en plus fasciné par les yeux de la veuve, il ne peut s’empêcher de la dévisager. Le grain de sa peau, le velours de sa bouche, ses longs cils balayant les rayons du soleil importuns, tout chez elle le touche. La différence d’âge ne l’empêche pas de s’imaginer caressant cette peau, effleurant cette bouche et suivant du doigt cette fine veinule bleutée qui parcourt avec nonchalance la ligne de son cou pour mourir sur ses seins.

Est-ce sa nuit d’insomnie dans la fournaise de son appartement ? Son état émotionnel sur le fil depuis sa rupture avec Adeline ou la pression et le stress engendrés par cette enquête hors du commun ? Il se sent détaché de lui-même, comme libéré de l’emprise de son propre corps et éprouve des sensations qui lui sont étrangères. S’étonnant lui-même, il se laisse aller, en pleine audition, et malgré la gravité de l’instant, à un doux vagabondage intellectuel, bercé par sa petite musique intérieure.

Peyot, le voyant de dos, n’a pas remarqué l’air béat de son adjoint et poursuit d’un ton professionnel.

— Nous avons besoin de vous pour nous éclairer sur un certain nombre de points concernant votre belle-fille.

Devant la moue obstinée de Christine Dormeux, Peyot ajoute, intraitable.

— Il va sans dire que je compte sur votre entière coopération. Un refus de votre part serait fort mal accueilli. Le capitaine Brumel va vous poser quelques questions et je vous saurais gré de bien vouloir y répondre de la manière la plus précise possible.

Malgré la tension palpable dans la pièce, Domingo ne peut s’empêcher d’esquisser un sourire.

Peyot et ses grandes phrases.

Qu’est-ce qu’il a pu en entendre parler ! Il lui a fallu attendre de les voir sortir de la bouche du commandant pour réaliser que les railleries et les imitations circulant dans les vestiaires du commissariat étaient à peine exagérées.

Je vous saurais gré… Il serait fort mal accueilli… Force est de reconnaître… Ces expressions pompeuses,

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