Le Sang Noir by Guilloux Louis

Le Sang Noir by Guilloux Louis

Auteur:Guilloux,Louis [Guilloux,Louis]
La langue: eng
Format: epub
Tags: Roman Historique
Éditeur: Gallimard
Publié: 2013-05-13T22:00:00+00:00


Un vestibule sombre. Au fond de ce vestibule, une porte ouverte et dans le cabinet provisoral, M. Marchandeau et sa femme.

Ils ne l’avaient pas entendu. Cripure aurait pu se croire soudain transporté dans une loge de théâtre. Il retint son souffle, n’osa plus avancer : panique. À présent, il aurait voulu fuir.

Que dirait-il, si on le découvrait ?

Le Proviseur tournait le dos à Cripure. Sur le visage de Mme Marchandeau un air de douleur qui lui rappela celui de Toinette dans leur dernière scène d’explications : un air de détresse, dont il n’avait pas eu pitié, ce même mouvement convulsif des lèvres et dans la gorge, ce petit tressaut.

Grâce à Dieu, il était survenu au moment où ils se séparaient. Mme Marchandeau recula jusqu’au fond de la pièce et rentra chez elle sans un mot. Cripure n’osa pas encore se montrer. Une scène de ménage ? Il était survenu à la fin d’une de ces petites… cérémonies bourgeoises… Et pendant que le fils…

Le Proviseur s’assit à son bureau et se mit à écrire, mais il déchira bientôt sa feuille et la jeta dans sa corbeille. Il en prit une autre, mais cette fois il ne tenta même pas d’écrire. Il posa son porte-plume, se leva, prit sa corbeille et en jeta le contenu dans le poêle. Une flamme s’éleva. La pièce se remplit de fumée et M. Marchandeau referma le poêle et, tenant toujours sa corbeille à la main, il arpenta son bureau.

Cripure se décida enfin. Il toussa, frappa le sol du bout de sa canne et entra dans le cabinet d’un grand pas lourd comme une embardée d’ivrogne. Son pas résonna sur le tapis et fit tinter quelque part un objet en verre, une des lampes mal accrochées du piano peut-être, ou un coupe-papier, sur le bois lisse du bureau.

Le Proviseur le regarda sans étonnement. Il cessa d’arpenter le bureau, oublia de reposer sa corbeille à papier et murmura :

— Tiens ?

— N’est-ce pas, commença Cripure, d’une petite voix sifflante, n’est-ce pas, monsieur le Proviseur, je m’excuse, n’est-ce pas, mais, j’ai trouvé la porte ouverte, et, n’est-ce pas, il m’a semblé que… Vous ne m’avez pas entendu, n’est-ce pas ? C’est que… Pardonnez-moi si j’insiste, mais j’ai à me plaindre, n’est-ce pas…

Le Proviseur ne répondit rien.

Cripure continua :

— Monsieur le Proviseur, il me faut tout de même protester contre certains agissements, n’est-ce pas, dont vous allez dire évidemment…

Tenant toujours sa corbeille à la main, il regardait Cripure d’un œil fixe, peut-être vide…

— Je viens porter plainte, tonna Cripure, plainte, m’entendez-vous, monsieur ?

Un vague sourire parut sur le visage de M. Marchandeau. « Ah ! pensa Cripure, il se moque de moi ! »

— C’est intolérable ! s’écria-t-il. Vous osez vous moquer ! J’irai…

Il allait dire qu’il irait plus loin, qu’il irait trouver l’inspecteur d’Académie, ou le Recteur, et pourquoi pas le Ministre ? Les mots ne vinrent plus. M. Marchandeau venait de reposer sa corbeille. Il tendait à Cripure une lettre.

Cripure eut un geste comme de refus.

— Moi ?

— Lisez.



Télécharger



Déni de responsabilité:
Ce site ne stocke aucun fichier sur son serveur. Nous ne faisons qu'indexer et lier au contenu fourni par d'autres sites. Veuillez contacter les fournisseurs de contenu pour supprimer le contenu des droits d'auteur, le cas échéant, et nous envoyer un courrier électronique. Nous supprimerons immédiatement les liens ou contenus pertinents.