Le roman soviétique, un continent à découvrir by Fernandez de l'Académie Française Dominique

Le roman soviétique, un continent à découvrir by Fernandez de l'Académie Française Dominique

Auteur:Fernandez de l'Académie Française Dominique [Fernandez, Dominique]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Grasset
Publié: 2022-11-16T08:18:45+00:00


Ces pages respirent une fraîcheur et une spontanéité faciles mais charmantes, qui font un nuancé et beau roman malgré le sujet obligé. Chacun des enfants réagit selon sa condition sociale et sa maturité intellectuelle. Le port et les rues d’Odessa, le fameux escalier et la statue du duc de Richelieu qui le domine, de ce Français nommé par Alexandre Ier gouverneur d’Odessa et refondateur de la cité de 1803 à 1814, les boutiques, les kiosques et les entrepôts, les quartiers riches et les quartiers pauvres, fournissent à leurs jeux et à leurs aventures, à leurs peurs et à leurs fanfaronnades, un décor évoqué avec une précision qui ne pèse pas.

En 1937, un livre de souvenirs (Le Puits sacré, trad. Lily Denis, Gallimard, « Littératures soviétiques », 1970) évoque sa vie de famille, ses enfants, la Géorgie, Tbilissi, « cette capitale tapissière », Mandelstam, ainsi qu’un long voyage en Amérique, où, d’abord effaré de voir une interminable, luxueuse limousine conduite par un chauffeur en casquette véhiculer un costume – accroché à un cintre, sans personne dedans – qu’il aide à s’extraire de la voiture pour le livrer au majordome en casquette d’un hôtel particulier, il apprend à aimer un pays où dans la pénombre d’un cinéma des garçons et des filles pleurent le sort de deux jeunes amoureux de West Side, le rêve brisé d’un Roméo blanc et d’une Juliette noire. « J’ai compris la tragédie d’un grand État [l’URSS] qui a choisi la voie romaine, non la voie athénienne », c’est-à-dire le régime des coupoles, ces couvercles qui étouffent et éteignent.

N’en avait-il pas été lui-même une des victimes ? Son roman publié en novembre 1937, au moment des grandes purges, Je suis le fils du peuple travailleur (jamais traduit), semble être un retour et un acte d’allégeance au réalisme socialiste le plus plat. Ukraine 1918 : le soldat Semyon Kotko rentre de guerre dans son village. La paix a été signée avec Berlin, les bolcheviks ont pris le pouvoir, mais ils se heurtent aux Blancs qui s’appuient sur les restes de l’armée allemande d’occupation et organisent des contre-attaques. Semyon Kotko, qui a retrouvé sa mère, sa sœur et sa fiancée Sophia, s’engage avec les partisans. Tkachenko, le père de Sophia, est un riche propriétaire, égoïste et brutal, qui n’entend pas donner sa fille à un simple paysan. Quand un détachement allemand d’arrière-garde encercle le village, Tkachenko dénonce à son commandant – le noble (évidemment) von Wierhof – Semyon et ses camarades. Certains sont exécutés, lui arrive à s’échapper. Il organise la résistance, les Allemands sont chassés, Tkachenko fusillé, le mariage de Semyon et de Sophia célébré. Une unité de l’Armée rouge fait son entrée dans le village, acclamée par la population : « La cavalerie traverse l’Ukraine libre, telle une avalanche enflammée. »

Un tel roman ne mériterait pas d’être rappelé, si Alexeï Tolstoï ne l’avait fait lire à Prokofiev, et si celui-ci n’avait eu l’idée d’en faire un opéra, intitulé Semyon Kotko. Par opportunité politique, dira-t-on, mais aussi par patriotisme



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