Le Retour by Robert Goddard

Auteur:Robert Goddard [Goddard, Robert]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Policier, thriller
Amazon: B00MXBCXJU
Éditeur: Sonatine
Publié: 2014-08-27T22:00:00+00:00

Sur ce point, songeais-je en me promenant dans les bois à Trelissick, Vigus avait eu ce qu’il voulait. Je partageais son fardeau, désormais. Je savais. Pire encore, je soupçonnais. Grand-mère s’était-elle confiée à d’autres membres de la famille ? Mon père avait conseillé à ma mère d’ignorer Vigus, d’oublier tout ça. Pourquoi ? Pourquoi une telle intransigeance ? J’observais à travers les arbres le King Harry Ferry et j’écoutais le cliquetis régulier de sa chaîne à mesure que je rembobinais le fil que j’avais laissé traîner durant des années. Ce mensonge constituait une simple brèche susceptible de se transformer en un millier de craquelures dans le vernis lisse du passé et du présent de ma famille. Il ne prouvait rien. Il n’innocentait personne. Mais il signifiait que je ne pouvais plus m’arrêter.

Tully détenait toujours la clef, plus que jamais. Treffry m’avait dit, et à Nicky avant moi, qu’on ne le trouverait pas. Mais c’était le même Treffry qui avait qualifié Sam Vigus de témoin fiable. La vérité, c’était qu’il n’avait pas envie de trouver Tully, moi, si. Peut-être que si Nicky avait entendu la confession de Vigus, il n’aurait pas abandonné aussi facilement. Peut-être aurait-il entrepris ce que j’étais désormais déterminé à faire : retrouver la trace d’Edmund Tully, où qu’il se cache.

Les révélations de Vigus avaient fait une autre victime : la confiance. Je ne savais plus à qui je pouvais me fier. Grand-mère n’avait parlé qu’à moi, à personne d’autre. Elle était restée muette et inerte la majeure partie des deux jours qui avaient précédé mon arrivée, rassemblant ses forces, peut-être, mettant de l’ordre dans ses idées. Mais pourquoi vouloir se confier à moi ? Parce qu’elle me jugeait capable de traiter au mieux cette information ? Ou parce qu’elle avait le sentiment que j’avais le droit de savoir ce que d’autres savaient déjà ? Ma mère ne m’aurait pas envoyé voir Vigus si elle avait eu une vague idée de ce qu’il voulait raconter. Elle au moins était hors de cause. Les autres, non. Pas même Pam. Ce qui m’ôta tout scrupule à pénétrer dans l’appartement de Tredower House ce soir-là, sous couvert de l’obscurité, afin de m’emparer de la photo dans le bureau pendant que ma sœur effectuait bravement, sourire aux lèvres, le tour des tables de son restaurant. Il y avait des chances que je sois déjà parti quand elle remarquerait sa disparition. Mais même dans le cas contraire, jamais il ne lui viendrait à l’esprit de me soupçonner.

Je me rendis plus tard en voiture au motel Trumouth, où je confiai au réceptionniste les clefs de Trevor glissées dans une enveloppe à son nom. Le beau-frère n’était pas là, sûrement occupé à noyer son chagrin je ne sais où. Je fus soulagé de pouvoir filer sans avoir à rejeter sa demande suppliante de lui remettre la moitié compromettante de la photo. J’avais déjà décidé de m’en faire faire une copie afin que Pam puisse confier l’original à son avocat si elle le souhaitait et quand le moment viendrait.

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